Réflexions de Fidel Castro
UN EXEMPLE DE CONDUITE
COMMUNISTE
Je veux parler d’une Chilienne, Elena Pedraza, spécialiste de haut
niveau en physiothérapie. Elle a visité Cuba pour la première fois voilà plus
de trente cinq ans. Allende, médecin de profession, n’était pas encore
président du Chili.
J’écris ces réflexions en résumant en partie les six pages imprimées en
petits caractères qui me sont parvenues. Elles sont un peu plus longues que la
normale, mais dans l’idée qu’un journal ou une revue publie ensuite le texte
complet de l’allocution que cette spécialiste chilienne a prononcée le
Laissons-la donc s’expliquer :
« Je suis arrivée en 1966, quand Cuba entrait
dans une étape historique. Ses débuts étaient marqués par de grandes
difficultés et carences ; il fallait régler des problèmes urgents, dont
celui de la santé, qui était considérée prioritaire…
« …Il fallait des personnels formés dans cette
spécialité et donc envisager leur formation, et ce avec une certaine urgence.
Il fallait le faire, malgré toutes les limitations existant dans le pays.
« Néanmoins, la société prend toujours plus
conscience de la marginalisation dans laquelle vivent les handicapés. Cuba, par exemple, ne comptait qu’un petit
nombre de thérapeutes empiriques, dont certains s’étaient formés aux Etats-Unis
pendant des stages d’été et d’autres avaient abandonné le pays.
« Le docteur Machado Ventura, alors ministre de
« Ma formation de kinésithérapeute a commencé en
1930…
« Mes trente années de travail dans mon pays, le
Chili, ont été dures…
« Une fois conclue ma vie professionnelle au
Chili, je n’ai pas hésité à rénover cet engagement à Cuba en 1966.
« Mes premiers contacts ont eu lieu à l’hôpital
Frank País, très bien organisé pour traiter les patients, enfants et adultes,
dans les spécialités de traumatologie et d’orthopédie. On m’a expliqué que les
soins étaient auparavant très sélectifs et qu’une quantité très réduite de la
population le plus dans le besoin pouvaient y accéder.
« A mesure que je faisais connaissance du milieu
où je devais travailler, je me rendais compte que le travail était énorme et
prendrait du temps. En tout cas, je constatais que l’Etat s’inquiétait déjà
afin que le droit à la santé et à son rétablissement s’étende à toute la
population du pays.
« Il fallait commencer. Je visitais une grande
partie du pays et connu différents endroits ; je suis allé à Santiago de
Cuba, une très belle ville coloniale. C’est là que j’ai tenté pour la première
fois de donner un cours de formation élémentaire dans un petit centre de traitement
de patients souffrant différents troubles neuromoteurs que dirigeait le docteur
González Corona…
« Ce médecin avait construit ses propres
instruments pour traiter ses patients. Il me raconta comment il faisait
lui-même les appareils des enfants poliomyélitiques avec des déchets de plaques
d’aluminium. Il avait aussi construit des barres parallèles et une piscine
rudimentaire pour les exercices dans l’eau.
« C’est en 1966 que j’ai commencé officiellement
à donner des cours plus programmés en kinésithérapie à des élèves de
physiothérapie de l’hôpital Frank País.
« C’est alors que j’ai constaté combien j’avais
vu juste d’amener les livres les plus importants pour un bon enseignement. Il
n’y avait pas de matériaux d’études, il fallait tout faire avec les moyens du
bord. Mais l’intérêt des élèves pour apprendre et le mien pour leur enseigner
était immense, alors que je n’avais pas de références et que ce n’était pas mon
métier ; en fait, tout répondait à l’expérience que j’avais acquise dans
mon pays et à la responsabilité que je pense avoir toujours eue toute ma vie
dans mon travail lié à la clinique hospitalière.
« Tel a été le point de départ qui m’a servi de
modèle pour les cours futurs, l’expérience acquise nous ayant permis de mieux
ajuster chaque année les programmes. Au bout des trois années de formation,
l’expérience nous a permis de préparer des livres de texte intégraux, autrement
dit d’avoir les bases essentielles d’un programme pour des cours réguliers.
« Durant mon passage à cet hôpital, j’ai pu
acquérir de nombreuses expériences qui allaient m’être très utiles durant les
années où j’ai travaillé à Cuba.
« Le développement de ce qui est aujourd’hui la
physiothérapie à Cuba démarre à partir de ces expériences que je raconte, cette
spécialité s’étant étendue peu à peu à tout le pays pour aboutir à ce que nous
pouvons apprécier maintenant à ce Congrès.
« …J’ai visité en guise d’information les
hôpitaux et les polycliniques périphériques situés dans toutes les régions du
pays, même dans les endroits les plus reculés. J’ai constaté dans certains que
de petits départements de physiothérapie s’y organisaient d’une manière modeste
et réduite. D’autres déjà installés prêtaient des services à la population,
mais manquaient des personnels formés requis par cette spécialité.
« …Il était intéressant de voir que tout le
monde s’efforçait de régler peu à peu cette voie sur laquelle nous étions tous
engagés. Cette expérience fut très importante pour moi : je voyais
comment, depuis les ministères de
« C’est en 1979 que j’ai donné mes premières
classes comme professeur de kinésithérapie dans les programmes destinés aux
résidents de la spécialité de médecine physique et de physiothérapie… Je leur
ai appris aussi à toujours contrôler les examens, à éviter les imprécisions et
les commentaires défavorables, afin de projeter correctement le plan d’action.
J’ai pu constater que ça devrait toujours être une norme morale pour éviter
ainsi que le patient ne se sente dévalué au début d’un traitement.
« Mes années à l’hôpital Julio Díaz ont été très
enrichissantes, elles m’ont permis de connaître toutes les situations que vit
un handicapé ; le centre traitait les patients en services hospitaliers et
ambulatoires, et touchait une population très nombreuse. A mesure que j’écris
ces souvenirs, je me situe à cette époque lointaine. Je dois dire que j’ai
connu un peuple généreux et solidaire. L’hôpital a été équipé toujours plus de
nouveaux éléments permettant de donner un traitement plus complet aux patients ;
on ajoutait chaque année de nouvelles spécialités, et on agrandissait l’édifice
au point qu’il est maintenant une petite citée.
« …J’ai pu me rendre compte qu’un thérapeute
n’oublie pas les bases théoriques et pratiques dans lesquelles il a été formé.
Il doit encore moins oublier de toujours étudier et de se recycler.
« J’ai éprouvé pour cet hôpital la même
affection que l’on sent pour son chez-soi. Je ne peux m’empêcher de me rappeler
tant de choses que j’ai vécues, auprès de tant de compagnons de travail, thérapeutes,
médecins, personnel auxiliaire, qui m’ont toujours chaleureusement estimée…
« Je dois aussi rappeler mon passage dans
d’autres hôpitaux où j’ai fait classe, donné des conférences et des cours de
formation, comme, par exemple, l’hôpital Hermanos Ameijeiras. Dans les années
70, afin de contribuer au développement de la médecine à Cuba, les Chiliens qui vivaient en exil (bien que
je ne me sois jamais sentie une exilée à Cuba) ont décidé de financer l’achat de
vingt-trois volumes de kinésithérapie, en réponse au fait qu’il était difficile
d’acquérir des livres de texte étrangers si nécessaires pour améliorer
l’enseignement et la formation des professionnels.
« Ce Congrès donne une vision très complète de
ce qui se fait en physiothérapie dans tout le pays. Ceci reflète l’inquiétude
du gouvernement et du corps médical, ainsi que l’intérêt de recyclage des
personnels travaillant dans ce secteur et dans cette spécialité.
« Le thème de ce Congrès : "Handicap,
rétablissement, humanité" nous engage à évaluer bien plus ce que nous
donnons aux handicapés. Nous nous efforçons de rétablir, mais quand ce thème
s’étend à ce mot "humanité", je me rends compte que ce n’est plus un
simple mot, mais un appel au plus profond : l’humanité et la dignité des
êtres humains.
« On constate à ce congrès international le gros
volume de travail des médecins cubains et des autres composants de l’équipe de
physiothérapie, qui exposent leurs expériences dans tous les domaines des
spécialités médicales, ce qui prouve le dévouement constant et la
responsabilité dans les communications nationales et étrangères présentées à ce
Congrès.
« Je veux adresser aux jeunes qui ont été mes
élèves et qui sont maintenant des professionnels à grande expérience et à grand
prestige, un salut affectueux et amical. J’ai partagé avec eux des tâches aussi
gratifiantes que le travail bénévole qui a toujours été à Cuba un complément du
travail citoyen.
«
Après le coup d’Etat fasciste financé au Chili par le gouvernement
étasunien, des milliers de citoyens ont été incarcérés, torturés, disparus ou
assassinés dans le pays et à l’étranger. Elena Pedraza vient à Cuba d’où elle
visite différents pays, réclamant la solidarité mondiale des femmes. Elle
continue de mener sur notre terre ses recherches et son programme de formation.
Plus tard, elle rentre dans sa patrie où elle continue de collaborer avec Cuba.
J’ai pu feuilleter voilà quelque jours un excellent ouvrage dont l’auteur,
la docteur Debra Rose, est citoyenne des Etats-Unis, le pays où la
physiothérapie constitue le service le plus cher, le plus élitaire et le plus
inaccessible aux pauvres, et qui interdit en plus à Cuba d’accéder aux
connaissances. Elena, qui n’a jamais cessé de transmettre des informations
permettant d’élever le niveau scientifique de nos spécialistes, nous a envoyé,
entre autres ouvrages, ce livre qui contient plus de cent exercices simples et
accessibles.
Aujourd’hui, la physiothérapie prend une signification spéciale et
novatrice en rapport avec la vie. Toute personne augmente ses potentialités
mentales et physiques jusqu’à trente-cinq ans, et certains parlent de seulement
trente ans. A partir de cet âge, on peut continuer pendant vingt ou trente ans
de plus à jouir d’une bonne santé et d’un bon rendement physique, les
conservant à partir de cet âge butoir jusqu’à un âge avancé où la vie finit par
s’éteindre. Les êtres humains sont heureux de pouvoir se suffire à eux-mêmes
jusqu’à la fin.
La physiothérapie concerne tous les habitants de notre pays où l’espérance
de vie est de soixante-dix-sept ans et continue de croître. Ce ne sont pas
seulement les adultes de moins de trente-cinq à quarante ans, victime
d’accidents de toutes sortes, mais aussi très fréquemment de nombreux enfants
qui ont besoin des nobles traitements du
physiothérapeute.
Environ dix mille thérapeutes travaillent dans plus de six cents centres
installés dans des polycliniques ou des hôpitaux, ou prêtent service à
l’étranger, tandis que des milliers d’autres se forment avec toujours plus de
rigueur et d’exigence.
Elena Pedraza, qui a plus de quatre-vingt-dix-sept ans, continue de
prêter des services conseil. Elle constitue un exemple de travailleuse
intellectuelle, de femme et de communiste. Elle a milité dans le parti de
Ricardo Fonseca, de Luis Corvalán, de Volodia Teteilboim et de Gladys Marín,
récemment décédée, et de bien d’autres qui ont consacré leur vie à leurs idées
ou qui sont morts pour elles.
Au nom du peuple qui, défiant l’Empire, s’est engagé depuis un
demi-siècle sur la voie de
Fidel Castro Ruz
17 h 12