Table ronde « Qui sont les vrais terroristes ? », studios de la Télévison cubaine, 22 mai 2002.
Randy Alonso.
Bonjour, chers téléspectateurs et auditeurs.Hier, l’administration nord-américaine, faisant preuve de son habituelle arrogance de flic mondial, a rendu publique sa fameuse liste des nations parrainant le terrorisme dans laquelle elle a inscrit Cuba sans le moindre fondement ni la moindre justification.
Notre table ronde de cette après-midi, intitulée : « Qui sont les vrais terroristes ? » est composée de Juan Mendoza, vice-doyen de la faculté de Droit de l’Université de La Havane ; Lázaro Barredo, journaliste de Trabajadores ; Manuel Hevia, directeur du Centre de recherche historique de la Sécurité de l’Etat ; Rogelio Polanco, directeur du journal Juventud Rebelde ; Juan Carlos Rodríguez, chercheur et directeur des éditions Capitán San Luis, et Reinaldo Taladrid, journaliste du Système d’information de la Télévision cubaine.
Les invités sont des membres des Troupes spéciales des Forces armées révolutionnaires, de l’Armée des jeunes travailleurs et du Comité national de l’Union des jeunes communistes.
(Vidéos sur le thème.)
Aujourd’hui, le journal Granma a publié un éditiorial intitulé Bataille d’idées, reproduit par Juventud Rebelde, que je vais lire pour introduire notre table ronde :
Comme il fallait s’y attendre, le sieur Bush a, le 20 mai, lancé un brûlot virulent contre Cuba de Washington puis de Miami. Ce même jour, son administration a modifié les heures de transmission habituelles de sa télévision subversive pour la faire coïncider avec les horaires de nos Tables rondes télévisées. Elle a annoncé encore plus de fonds, de mesures et de techniques pour semer le poison dans notre pays.
Quelques jours avant, le 6 mai, elle avait aussi lancé, par l’intermédiaire d’un secrétaire d’Etat adjoint, l’immonde calomnie selon laquelle Cuba mettait au point des armes biologiques.
Hier, 21 mai, vers midi, le département d’Etat a rendu public son Rapport annuel où, comme il le fait sur bien d’autres thèmes, il juge et décide quels sont ceux qui parrainent le terrorisme dans le monde, appuient le trafic de drogues, violent les droits de l’homme, et tout le saint-frusquin.
A sa manière cavalière accoutumée, l’administration a inscrit Cuba sur sa liste des pays qui soutiennent le terrorisme. Or, il ne s’agit pas d’une année quelconque ni d’« hippisme » : voilà quelques mois à peine, le peuple nord-américain a été victime d’un crime brutal de cette nature. L’inclusion de Cuba sur cette liste – que sa répétition ne rend pas moins arbitraire – vise à induire chez les Nord-Américains de la crainte et de l’antipathie envers notre pays. Mais elle permet aussi de constater jusqu’à quel point la mafia ignorante et cynique qui jouit de la plus grande influence dans le cercle intime du président des Etats-Unis peut être cynique et irresponsable : en effet, cette calomnie au sujet des armes biologiques cubaines était si grossièrement mensongère, si cousue de fil blanc, que de hauts fonctionnaires de l’administration ont eu le bon sens de se démarquer discrètement de cette assertion fallacieuse. C’était là une guerre politique dangereuse, dans le style des blitzkrieg nazis, contre Cuba, dont ces benêts pensaient qu’elle allait nous surprendre et nous assommer.
On a pu voir le sieur Bush sur les écrans de télévision de Miami : le visage colérique, des mines de méchant, de bizarres grimaces… On aurait dit quelqu’un qui a des envies de tuer, sans qu’on sache trop qui. Il parlait et se réfrénait. Il voulait ajouter et se retenait. Il utilisait des phrases menaçantes, visant peut-être par là à terroriser ceux qui – il ne le sait que trop ou du moins il devrait le savoir – ne cilleront jamais devant les insultes grossières, la furie rageuse et les armes meurtrières d’un empereur, le doigt sur la gâchette. A la télévision, il ne manquait plus au sieur Bush que l’écume aux lèvres.
Le public hystérique d’apatrides, d’apatrides, de prévaricateurs d’hier et d’aujourd’hui, et tout particulièrement de terroristes qui ont semé le deuil et la mort dans notre peuple tout au long de plus de quarante ans, ce public qui applaudissait avec frénésie chacune des phrases menaçantes que le sieur Bush a prononcées contre notre pays et chaque promesse de sa part d’être dur vis-à-vis de Cuba, de perpétuer et de renforcer le blocus économique, a causé de la répugnance et de l’aversion chez notre peuple héroïque, plus uni et plus prêt que jamais à lutter.
Nous démolirons un par un les arguments, les tromperies, les trucs, les procédés démagogiques et les mensonges du sieur Bush.
Peu importe combien durera ce dur combat de notre longue guerre. Nous sommes lancés dans une grande bataille d’idées, dans une lutte sans précédent entre la vérité et le mensonge, l’ignorance et les connaissances politiques et historiques, la culture et la barbarie, la morale et la carence totale de principes et de valeurs éthiques, l’honnêteté et le cynisme ; entre l’oppression et la libération, la justice et l’injustice, l’égalité et l’inégalité, les cauchemars du passé et les rêves d’avenir, la destruction et la préservation de la nature, l’extermination et la survie de notre espèce.
Le 19 mai, jour de sa mort au champ d’honneur, notre peuple a commencé à monter une garde d’honneur devant la tombe de Martí. Et pour tous les temps.
Aucune force au monde, actuelle ou future, ne nous fera abdiquer, abandonner ou trahir nos nobles causes!
Et nous continuerons d’être, sans que rien ne puisse nous dévier de cette route, des amis inébranlables et des alliés du peuple nord-américain et de tout autre peuple du monde dans la lutte contre le terrorisme.
Cet éditorial proclame donc la bataille de notre peuple face aux nouveaux mensonges, aux tromperies de l’administration nord-américaine, qui ont débuté par le prétendu terrorisme bactériologique de Cuba, qui ont continué par les discours du président Bush à la Maison-Blanche et à Miami, devant la mafia terroriste, devant ses amis de la Floride et qui ont conclu hier avec cette publication de la liste des pays parrainant le terrorisme, une liste qui apporte quelques nouveautés. Reinaldo Taladrid nous l’explique.
Reinaldo Taladrid. Je dois dire tout d’abord que ce rapport annuel sur le terrorisme que doit présenter le département d’Etat sur décision du Congrès n’est que l’une des nombreuses listes que dresse le gouvernement de l’empire pour juger le monde entier : vous vous portez bien ou vous vous portez mal en matière de trafic de drogues, en matière de terrorisme, etc. L’empire juge, note, menace ceux dont il estime qu’ils ne se portent pas bien. Mais le dénominateur commun de tous ces rapports, c’est qu’ils jugent toujours tous les autres, sauf les Etats-Unis eux-mêmes.
Ceci dit, que contient ce rapport ? L’introduction signale que le terrorisme a causé plus de victimes fatales cette année que jamais et elle en fournit des chiffres. Ces chiffres n’incluent pas, bien entendu, tous les gens qui meurent sur notre planète des conséquences d’autres formes de terrorisme, par exemple ceux qui meurent de faim ou de maladies parfaitement guérissables. Non, ceux-là n’apparaissent pas… Le rapport se concentre en fait sur huit Nord-Américains morts cette année, tout en rappelant la tragédie du World Trade Center et le reste. Le plus curieux, c’est que ces huit Nord-Américains sont morts en Equateur, aux Philippines, à Jérusalem, en Arabie saoudite et dans d’autres pays qui n’ont absolument rien à voir avec Cuba.
Mais quels sont donc les sept pays ou gouvernements parrainant le terrorisme,. Selon les USA ? Cuba, l’Iran, l’Iraq, la Libye, la République populaire de Corée, le Soudan et la Syrie. Et quelle sont les sanctions qui risquent de retomber sur ces sept pays ? Le rapport le dit clairement :
Le gouvernement des Etats-Unis peut appliquer immédiatement les sanctions suivantes aux pays inscrits sur cette liste :
Notez-bien : pas des demandes criminelles, qui sont autre chose, mais bel et bien des demandes civiles, qui impliquent de l’argent à la clef. Sur ce point, Cuba sait bien comment ça se passe : des terroristes des Etats-Unis, des gens qui ont posé des bombes, qui ont fait du terrorisme, ont pu présenter des demandes devant des cours nord-américaines pour tenter de s’approprier de l’argent cubain séquestré dans des banques nord-américaines, donc d’un argent déjà volé illégalement.
Randy Alonso. Oui, comme si l’argent déjà volé ne suffisait pas, on en arrive au comble de voir un des plus grands terroristes de cette faune de Miami, José Basulto, présenter une demande de quarante millions de dollars pour « dommages émotionnels » !
Reinaldo Taladrid. Comme les familles de ses subalternes avaient déjà touché de l’argent, le chef de ce secteur de la mafia y va à son tour… Et l’argent qu’il réclame fait partie de cet argent cubain mis sous séquestre.
Je poursuis la liste des sanctions :
Dans le cas de ceux qui font du commerce avec Cuba, c’est pire : on les emprisonne !
Randy Alonso. Jusqu’à deux cents ans !
Reinaldo Taladrid. Exact. Je continue :
Comme vous pouvez le constater, il y a belle lurette que toutes ces sanctions à la fois sont appliquées contre Cuba ! Bref, il ne reste que la calomnie infâme de l’inscrire sur cette liste…
Je voudrais ajouter trois petites choses. Dans quel contexte cela se fait-il ? En plus de ce que signale l’éditorial, je voudrais dire qu’on parle ces derniers jours de toute une série de nouvelles graves menaces pour le peuple nord-américain : le plasticage d’édifices, l’empoisonnement de l’eau potable, le plasticage du pont de Brooklyn… Un petit paquet inoffensif sur ce pont a entraîné sa fermeture.
Randy Alonso. Ce matin même…
Reinaldo Taladrid. Oui, alors, quand les plus hauts fonctionnaires de votre gouvernement vous serinent tout ça du matin au soir et qu’ils publient cette liste, le peuple nord-américain est forcément tenté de croire que les pays en question vont justement faire ce genre d’actions dont on le menace…
Deuxièmement, la politique officielle de la Maison-Blanche vis-à-vis de Cuba n’a jamais été si contestée en quarante-deux ans aux USA mêmes, de la part de l’opinion publique, de la société civile, des hommes politiques et des hommes d’affaires. Tous les sondages d’opinion prouvent que toujours plus de gens jugent que cette politique ne sert à rien d’aucun point de vue. Bref, l’inclusion de Cuba sur cette liste est une nouvelle tentative de justifier cette politique si contestée, qui comprend, rappelons-le, le blocus.
Troisièmement, que de mensonges en un peu moins d’un mois ! Les prétendus avions cubains ayant atterri à Caracas, les prétendues armes biologiques, Cuba comme Etat-parrain du terrorisme… Derrière tout ça, on ne peut ignorer la présence à la tête de la politique latino-américaine du département d’Etat d’Otto Reich, le grand désinformateur, ou plutôt le plus grand menteur qu’ait jamais eu le département d’Etat en matière de politique latino-américaine. Il est tout à fait symptomatique que tous ces mensonges coïncident avec la présence à ce poste de ce fieffé menteur.
Voilà ce que j’avais à dire sur ce rapport du département d’Etat au sujet du terrorisme.
Randy Alonso. S’il est vrai que toutes ces mesures de rétorsion dont tu as parlé sont déjà appliquées contre notre pays dans le cadre du blocus, il n’en reste pas moins que cette inclusion de Cuba comme nation terroriste a une signification politique incontestable après le 11 septembre. Qu’importe ensuite le manque total d’arguments ! Et les mensonges ! Otto Reich en personne n’a-t-il pas affirmé hier, devant la commission du Congrès qui discutait de la question du commerce avec Cuba, que les cinq patriotes cubains incarcérés aux USA allaient y semer le terrorisme et que Cuba pratiquait le terrorisme biologique ? En plus de diriger la politique latino-américaine au département d’Etat, Otto Reich semble aussi diriger ce fameux département de la Désinformation qu’il avait créé sous Reagan… En tout cas, il en a rajouté par rapport à son chef, Colin Powell, qui a présenté ce rapport.
En tout cas, la présentation de cette liste, hier, a suscité une série de questions de la part de la presse nord-américaine qui s’est demandée quels étaient les arguments expliquant cette inclusion de Cuba. Rogelio Polanco nous en parle.
Rogelio Polanco. C’est Taylor qui a présenté, aux côtés de son chef Powell, cette liste que le département d’Etat dresse systématiquement ces dernières années. Et ses réponses aux journalistes ont été plutôt miteuses.
Un journaliste lui a demandé : « Le département d’Etat a-t-il des preuves de plans terroristes, réussis ou non, de la part de Cuba ou s’agit-il alors d’une simple dénonciation politique ? » Réponse de Taylor : « L’histoire de Cuba en matière de terrorisme est un peu ambiguë, à vrai dire. Le président Castro a condamné les attentats du 11 septembre, mais il n’a pas renoncé au terrorisme comme arme politique et révolutionnaire légitime. » Quelle infamie ! Bien entendu, le journaliste lui rétorque : « Comme vous ne mentionnez aucun complot direct ni aucun soupçon direct, je dois en conclure que le département d’Etat n’a aucune preuve qui lie Cuba à des attaques terroristes. » Réponse de Taylor : « Nous n’avons pas d’information déclassifiée à laquelle nous pouvons faire référence publiquement pour l’instant. » Sans commentaires !
Je dois rappeler que nous avons eu droit à un rideau de feu ces quinze derniers jours : le 6 mai, Bolton, un des secrétaires d’Etat adjoints, a déclaré que Cuba fabriquait des armes biologiques et en vendait à d’autres pays, un mensonge infâme que Cuba a démenti catégoriquement. Mais de nombreux fonctionnaires nord-américains – et c’est ça qui est intéressant – l’ont fait aussi : l’ancien président Carter, qui a visité justement le Centre de génie génétique et de biotechnologique incriminé, l’a nié, et a même rappelé qu’il avait eu une réunion avant son voyage à Cuba avec des fonctionnaires de la Maison-Blanche, du département d’Etat et des services de renseignements, qu’il leur avait posé des questions insistantes sur ce point et qu’aucun d’eux n’avait jamais affirmé avoir la moindre preuve de ces allégations.
Une semaine plus tard, le 13 mai, le secrétaire d’Etat en personne, Colin Powell, a dû rectifier son subalterne, affirmer qu’il n’existait aucune preuve, l’a démenti formellement et que ce qu’avait dit Bolton n’avait pas de sens. Bien entendu, il ne l’a pas dit dans ces termes, mais c’est en tout cas la conclusion qu’on tire de ses déclarations.
Randy Alonso. Powell a affirmé qu’il n’existait aucune preuve que Cuba produisait des armes biologiques, mais que ses installations avaient en tout cas la possibilité de le faire, même s’il n’existait aucune preuve qu’elle le faisait.
Rogelio Polanco. En effet, avoir les capacités de faire quelque chose et le faire sont deux choses bien différentes.
Le secrétaire de la Défense, Rumsfeld, a dit clairement qu’il ne connaissait aucun rapport du département d’Etat sur ce point. La conseillère de Sécurité nationale, Condoleezza Rice, a aussi hésité quand on lui a posé la question. Ça s’est passé le 20 mai, le jour même des discours de Bush. Un journaliste lui a demandé : « Ainsi donc, l’administration estime que Cuba fait partie de l’axe du mal ? » Et elle a répondu : « Euh, les Cubains ne font partie d’aucun groupe dans le continent, ils sont à part, où que vous veuillez les mettre… » Un truc de ce genre. Aucune preuve non plus de sa part. Et Bush en personne n’a même pas osé prononcé le mot de terrorisme, à plus forte raison de terrorisme biologique par rapport à Cuba dans aucun de ses deux discours de Washington et de Miami ! Les faits sont clairs, donc.
Le comble, c’est que le département d’Etat doit reconnaître dans son rapport que Cuba a été l’un des premiers pays à signer les douze accords internationaux de lutte contre le terrorisme et à les ratifier. N’empêche qu’il ajoute : « Fidel Castro, après le 11 septembre, a hésité dans la guerre contre le terrorisme. » Faux, archifaux ! Cuba n’a pas hésité. Cuba a été le premier pays à avoir dénoncé les actions terroristes brutales du 11 septembre, le premier à avoir offert sa coopération aux Etats-Unis, y compris la possibilité d’ouvrir ses aéroports aux avions nord-américains. Cuba a été le premier pays à avoir osé dire avec courage – alors qu’il est précisément victime du terrorisme depuis quarante ans – que cette question ne pouvait se régler par des guerres, mais par la coopération internationale. Cuba a été le seul pays à avoir engagé un débat national au moment de la présentation de sa Loi antiterroriste au Parlement, bien avant le 11 septembre. Et Cuba n’a cessé de dire – comme le rappelle l’éditorial du Granma – qu’il était un allié du peuple nord-américain dans sa lutte contre le terrorisme.
Bref, face à tous ces faits, les Etats-Unis ne répondent que par une kyrielle de mensonges infâmes absolument dénués du moindre fondement.
Randy Alonso. Sans aucun doute, les dirigeants nord-américains et le département d’Etat ont beaucoup fabulé ces derniers temps pour pouvoir inscrire Cuba sur la liste des Etats terroristes. Ce n’est pour pas rien que le journaliste posait la question : « Au-delà des motivations politiques, où sont les preuves ? » Car il était clair pour tout le monde que cette inclusion de Cuba n’était rien d’autre que l’argument politique dont l’administration avait besoin pour poursuivre ses plans agressifs contre notre pays, pour sous-tendre le discours qu’a prononcé Bush à Miami devant cette masse exaltée de terroristes et de kidnappeurs d’enfants qui l’écoutait. Bref, ces mensonges, ces magouilles, ces trucs et ces calomnies fallacieuses du président Bush et de son administration ces derniers jours ne sont que des prétextes visant à maintenir une politique agressive permanente contre le peuple cubain et sa Révolution. Il nous faut donc, pour ne pas faillir à l’histoire, pour ne pas faillir à la vérité, rappeler aujourd’hui quels sont les vrais terroristes.
(Images historiques d’actes terroristes contre Cuba.)
Dès avant 1959, les USA ont commencé à peaufiner des plans pour empêcher la victoire de l’Armée rebelle, ou, pour reprendre leur expression, la « victoire de Castro ». Des documents déclassifiés prouvent que l’administration Eisenhower a tramé des plans dans ce sens, a tout fait pour qu’il ne s’agisse que d’une simple substitution de figures, afin que la base du système néo-colonial instauré dans notre pays reste telle quelle.
Le 23 décembre 1958, Allen Dulles, le directeur de la CIA, affirmait : « Il faut éviter la victoire de Castro. » Mais comme la Révolution a bel et bien triomphé le 1er janvier 1959, apportant la liberté à notre peuple, les USA ont déclenché une sale guerre, une guerre terroriste contre la Révolution cubaine et le peuple cubain. C’est là une histoire que celui-ci n’a pas oubliée, qu’il a de nouveau évoquée lors de sa Demande contre le gouvernement nord-américain et qu’il convient de rappeler aujourd’hui que l’administration Bush catalogue Cuba comme un Etat terroriste. Oui, il faut rappeler à celui-ci et à ses thuriféraires quels ont été les vrais terroristes et quelles ont été les vraies victimes du terrorisme que son pays a pratiqué pendant plus de quarante ans contre nous. Et rappeler quels ont été les vrais instigateurs du terrorisme dans le monde.
Et ce, dès 1959, comme nous le dit Lázaro Barredo.
Lázaro Barredo. Avant d’entrer dans le vif du sujet, je voudrais reprendre une idée que tu as évoquée. Il ne fait pas de doute que celui qui a écrit le discours que Bush a prononcé à la Maison-Blanche mérite un Oscar, parce que, comme fiction, ça se pose là ! L’une des passages les plus insultants, c’est de l’entendre dire : « Les Etats-Unis n’ont pas l’intention de préfigurer la souveraineté de Cuba. Cela ne fait pas partie de notre stratégie ni de notre vision des choses. En fait, les Etats-Unis ont toujours soutenu avec énergie la liberté du peuple cubain. »
C’est là une moquerie sinistre quand on connaît l’histoire. En effet, aux racines mêmes de notre histoire nationale, au cœur même de notre problème national, il y a justement cette nécessité du peuple cubain de faire face à l’hégémonie et à la voracité des USA, à leur volonté d’empêcher l’indépendance de notre pays. Et pas seulement depuis le 1er janvier 1959. En tout cas, c’est depuis cette date que les agressions nord-américaines repartent de plus belle.
L’une des premières actions de l’administration Eisenhower, c’est d’avoir accueilli sans broncher les tortionnaires, les sbires, les gens qui avaient semé la terreur et endeuillé les familles cubaines, qui avaient tué des jeunes et des moins jeunes, d’avoir offert l’impunité totale aux responsables de la mort de près de vingt mille personnes, à ceux qui avaient puisé à pleines mains dans le trésor public, l’avaient dilapidé en expatriant des centaines de millions de dollars, d’avoir reçu à bras ouverts des gens qui n’avaient pas de documents légaux, qui avaient émigré illégalement. C’était en quelque sorte un antécédent de la loi d’Ajustement cubain qui viendrait plus tard : ce n’était pas des balseros, mais des yachteros, des avioneros, qui s’étaient enfuis dans la nuit du 31 décembre 1958 au 1er janvier 1959 et les jours suivants. Et les autorités nord-américaines ont reçu tous ces gens-là sans ciller, je le répète, malgré toutes les demandes présentées par la Révolution cubaine et malgré l’existence depuis 1904 d’un traité d’extradition entre les deux pays.
Et cette politique d’agression s’explique aussi par la volonté d’indépendance de la génération qui prend le pouvoir le 1er janvier 1959. Je voudrais attirer l’attention, parce que cela prouve la politique de principe inamovible de la Révolution et de la pensée révolutionnaire, sur un discours prononcé par Fidel le 13 janvier 1959, cinq jours après son entrée à La Havane :
L’amendement Platt, c’est fini Ç’a d’ailleurs été une grande injustice que d’imposer à une génération qui avait lutté pour l’indépendance cette loi-là qui lui enlevait justement l’indépendance. Il n’y a plus de régime militaire, il n’y a plus de militaires qui risquent de trahir la Révolution en s’emparant du pouvoir, comme ça s’est passé en 1933. Pour la première fois, il y a des hommes dignes à la tête du pays, des hommes qui ne se vendent pas et ne vacillent pas, des hommes qui ne prennent pas peur devant des menaces et qui sont prêts à agir sereinement, sans le moindre excès, décidés à ne jamais recourir à la force, mais qui, en tout cas, ne confondent pas les choses.
[…] Je crois que ce peuple-ci a les mêmes droits que d’autres à se gouverner, à se tracer son propre destin tout à fait librement et à faire les choses mieux et plus démocratiquement que ceux qui parlent de démocratie et ont envoyé des chars Shermann à Batista.
Un discours du 13 janvier 1959, je le répète, où Fidel ripostait aux campagnes orchestrées aux USA contre les mesures adoptées pour punir les coupables, les tortionnaires, les assassins et les voleurs du régime batistien, comme le réclamait le peuple, qui ont dû répondre de leurs méfaits devant la justice. Mais le peuple réclamait aussi l’extradition des gens accueillis si bénévolement aux Etats-Unis que ceux-ci les ont aidés à réaliser ensuite des activités terroristes contre notre pays.
Le 15 janvier, deux jours après le discours de Fidel, des législateurs nord-américains demandaient aux autorités de faire quelque chose. Ainsi, Wayne Hays, représentant de l’Ohio – peut-être était-il parent de Dennis Hays, le vice-président actuel de la Fondation nationale cubano-américaine – suggère des sanctions économiques, depuis la réduction des crédits jusqu’au refus d’acheter les exportations cubaines, dont le sucre, en passant par l’interdiction du tourisme nord-américain dans l’île. Nous sommes le 15 janvier, je le répète.
Le 30 mars, le général Maxwell Taylor, chef de l’état-major interarmes, déclare devant le Congrès : « La Révolution cubaine pourrait constituer le début d’une série de convulsions en Amérique latine qui donneraient l’occasion aux communistes d’occuper des positions. »
En avril, la revue Time exprime la pensée des milieux conservateurs nord-américains quand elle affirme que la neutralité proclamée par Fidel Castro était un défi aux Etats-Unis. En effet, selon cette pensée interventionniste, notre pays ne pouvait même pas être neutre.
Ce même mois, Fidel se rend aux USA, où il rencontre le vice-président Nixon qui donne ses impressions dans un mémorandum secret : « Il est soit incroyablement naïf au sujet de la menace communiste soit d’obédience communiste. Il me semble le premier… » De toute façon, il est partisan de constituer une force militaire secrète pour le renverser.
En juillet 1959, une sous-commission de sécurité interne du Sénat fait comparaître des criminels de guerre et des assassins avérés du régime de Batista, entre autres Manuel Ugalde Carrillo, l’ancien chef des services de renseignements militaires ; Francisco Tabernilla Dolz, l’ancien chef de l’armée ; Francisco Tabernilla Palmero, l’ancien chef des forces blindées ; Merob Sosa, ancien officier et criminel avéré ; Andrés Rivero Agüero, l’ancien président élu lors de la farce électorale de 1958 ; Rafael Díaz-Balart, ancien ministre de l’Intérieur ; Aurelio Arsenio Silva González, ministre du Travail, ainsi que d’autres officiers et partisans de la dictature de Batista.
Le Congrès écoute aussi, toujours en juillet, les déclarations du traître Pedro Luis Díaz-Lanz, l’ancien chef des forces de l’air, qui réalisera le 21 octobre une incursion aérienne sur La Havane dont le bilan et de deux morts et quarante-sept blessés. Díaz-Lanz continuera de se promener en toute impunité à Miami.
Les batistiens constituent aux USA une organisation terroriste, la première du genre, La Rose blanche, organisée par le père du législateur actuel, Lincoln Díaz-Balart, que Bush vient de serrer dans ses bras tant à Washington qu’à Miami. Le père, donc, Rafael, avait été ministre de l’Intérieur de Batista, comme je l’ai dit. L’organisation comprenait aussi Pilar García etson fils Irenaldo, Merob Sosa, déjà mentionné, et d’autres fonctionnaires de la dictature renversée très impliqués dans les exactions de celle-ci. Et cette Rose blanche s’associe au dictateur Batista et au dictateur de République dominicaine, Rafael Leónidas Trujillo, avec la complicité des USA, pour organiser une conspiration qui est découverte et déjouée par les forces révolutionnaires en août 1959.
C’est avec la complicité de ces gens-là que se déroulent les premiers soulèvements contre-révolutionnaires dans notre pays, réalisés d’abord par des sbires de la dictature, de janvier à avril. En Pinar del Río, par exemple, c’est le cas du caporal Lara et de « Belle Gueule », pour ne citer que deux exemples ; en Matanzas, de Graciliano Santamaría Rodríguez. Au dernier trimestre de 1959, on peut citer le soulèvement de Pedro Ramón Rodríguez Hernández en Las Villas, et d’Olegario Charlot Pileta et de Carlos Caraballo Guzmán dans l’ancienne province d’Oriente.
Toujours cette même année 1959, on assiste au début des incursions aériennes à des fins terroristes, telles que le lancement de substances inflammables sur des plantations de canne à sucre, des sucreries, des entrepôts, etc., ou encore le mitraillage d’un train de passagers dans la province de Las Villas. Autrement dit, toute une série d’actions typiquement terroristes. Ces avions partent des Etats-Unis sans que les autorités fassent quoi que ce soit pour les empêcher.
Randy Alonso. C’est un fait. Le jour même de l’incursion aérienne de Díaz-Lanz le 21 octobre 1959, un autre petit avion en provenance des USA lance des substances incendiaires sur la sucrerie Violeta (aujourd’hui Primero de Enero) et un autre, sur la sucrerie Punta Alegre (aujourd’hui Máximo Gómez), toutes deux à Ciego de Avila. Autrement dit, trois objectifs différents le même jour. Le lendemain, 22 octobre, nouveau bombardement par un B-26 de la sucrerie Punta Alegre, qui cause un mort et un blessé.
L’administration nord-américaine laisse faire ces anciens batistiens ou ces traîtres de la première heure qui tentent de semer le chaos, et ces actions s’intensifient après la Réforme agraire, en mai 1959, qui représente le coup le plus dur jamais assené aux propriétaires nord-américains, possesseurs des meilleures terres, qu’elle fait passer aux mains de ceux qui les travaillaient vraiment, les paysans cubains.
Bus, qui parle tant de la propriété privée, devrait savoir qu’il s’est agi de la plus grande distribution de propriétés jamais faite à Cuba ! C’est cette mesure favorable aux paysans cubains qui a suscité la recrudescence des actions contre-révolutionnaires et de la politique des USA contre notre pays. Si bien que c’est au cours du premier trimestre de 1960 que l’administration nord-américaine adopte un plan détaillé visant à renverser la Révolution. Reinaldo Taladrid nous en parle.
Reinaldo Taladrid. Oui, en effet, la différence par rapport aux autres mesures, c’est que c’est maintenant les plus hautes autorités qui s’engagent.
Le 10 mars 1960, en effet, le Conseil de sécurité national, un organe consultatif du président Eisenhower, se réunit en présence de celui-ci pour décider des moyens d’installer un autre pouvoir à Cuba. Or, ce Conseil est au cœur même de la Maison-Blanche, il a à avoir avec la politique extérieure, avec le sécurité nationale, avec les questions internationales ; il réunit le président, le vice-président, toute une série de hauts fonctionnaires de nombreuses agences du gouvernement.
Une semaine après, le 17 mars, le président Eisenhower approuve deux plans qui lui ont été présentés en plein Conseil de sécurité national et qui conduiront un an après à l’invasion de Playa Girón. Rappelons aussi que l’échec de cette invasion conduira à la crise des Missiles. D’ailleurs, le texte dit : « On fera tout pour l’exécuter de façon à ce que la capacité d’action des Etats-Unis augmente progressivement en cas de crise. » Autrement dit, dès le départ, les USA avaient prévu de s’engager toujours plus.
Le premier, intitulé « Programme d’action secrète contre le régime castriste », comprend quatre volets.
Le premier volet est le suivant : « Créer une opposition [Quelle expression, n’est-ce pas ? : « Créer » de toutes pièces ! Quelle est actuelle, cette expression ! » qui sera forcément située hors de Cuba [ça aussi, c’est très révélateur !] sous la forme d’un conseil ou d’une junte, en créant trois groupes d’opposition acceptables avec lesquelles la Central Intelligence Agency est déjà en contact. » Dès le départ, il faut donc que l’opposition soit acceptable pour les USA.
Le second volet : « Pour que l’opposition puisse se fasse entendre, lancer une puissante offensive de propagande en son nom... » Là encore, les termes sont très révélateurs : c’est le gouvernement nord-américain qui lance l’offensive au nom de l’opposition ! Même si c’est un traître, par exemple, qui parle, c’est le gouvernement nord-américain qui le fait. Je poursuis : « …en créant un radio clandestine qui émettra sur petites et grandes ondes et qui sera située probablement sur l’île Swan. » Cette fameuse radio Swan est un antécédent de Radio Martí : une radio du gouvernement, payée par le gouvernement et parlant « au nom de l’opposition », qui plus est, « créée » par ce même gouvernement. Bref, un instrument de guerre psychologique, de désinformation, qui est, rappelons-le, une des spécialités du nouveau secrétaire d’Etat adjoint aux affaires latino-américaines.
Troisièmes volet du plan : « Création et développement à Cuba d’une organisation chargée d’actions secrètes et d’opérations de renseignements et qui devrait répondre aux ordres et aux directives de l’opposition en exil, et dont le rôle sera : 1) fournir des renseignements importants ; 2) favoriser l’infiltration et l’exfiltration d’individus ; aider à la distribution de propagande ; planifier la dissidence [tiens, déjà !] et organiser des groupes comme indiqué plus haut. » De nouveau, tout conçu et fait par le gouvernement nord-américain.
Quatrième volet : « Développement d’une force paramilitaire hors de Cuba pour des actions de guérilla futures… de pair avec des mécanismes destinés à assurer le soutien logistique nécessaire aux opérations militaires secrètes dans l’île. » Des forces militaires, donc, qui viendront tirer, poser des bombes, lancer des grenades, car c’est bien ça que font des forces militaires, n’est-ce pas ? Et tout ça payé par le gouvernement nord-américain. Quand vous payez des groupes militaires pour agir dans un autre pays, qu’est-ce que c’est donc, si ce n’est du terrorisme !
Avant de passer au second plan adopté le 17 mars 1960, je voudrais m’arrêter un moment à un point spécifique du premier :
« La direction. On fera tout pour choisir un président, étant donné de trouver un successeur à Castro. La possibilité de renverser Castro devenant plus imminente, il faut choisir un leader bénéficiant du soutien nord-américain. » Cette « possibilité imminente », voilà quarante-deux ans qu’ils l’attendent ! En tout cas, ce sont eux qui choisiront.
J’en viens au second plan. Intitulé « Programme de pressions économiques sur Castro. » Mais, contrairement au premier, celui-ci n’a pas été déclassifié. Peut-être parce qu’il est toujours d’actualité, que c’est en quelque sorte l’anticipation du blocus. Du terrorisme pur et simple, en fait. Les seules choses déclassifiées, ce sont les notes des assistants à cette réunion du Conseil de sécurité national. Que comprenait donc ce Programme de pressions économiques ?
Vient ensuite un rapport un peu postérieur, dit Rapport Mallory : « La seule manière prévisible d’aliéner le soutien intérieur passe par la désillusion et le découragement provenant de l’insatisfaction et des difficultés économiques. Il faut utiliser au plus tôt tous les moyens concevables d’affaiblier la vie économique cubaine. »
Enfin, au cas où il vous resterait des doutes, je vais citer un autre document déclassifié où le président Eisenhower commente devant l’un de ses conseillers : « Le cas échéant, il faudra établir une quarantaine, car, si le peuple cubain a faim, il renversera Castro. » Tel a été en fait le vrai objectif du blocus établi plus tard : asphyxier Cuba pour que les gens aient faim. Toute cette phraséologie creuse selon laquelle le blocus vise la démocratie, la liberté, et le saint-frusquin, apparaît ici toute nue : que les gens meurent de faim, comme ça ils renverseront Castro !
C’est, une fois encore, une forme de terrorisme approuvé par la Maison-Blanche, par le Conseil de sécurité national, qui invalide un certain nombre de mensonges proférés par Bush dans ses deux discours du 20 mai dernier.
Randy Alonso. Eisenhower voulait-il imiter le général espagnol Weyler, qui avait ordonné la concentration des paysans pour combattre les insurgés pendant la seconde guerre d’Indépendance et qui a causé tant de morts ?
Un facteur clef du document que tu as lu, ce sont des actions de sabotage, des attentats, du terrorisme, afin de provoquer un changement de gouvernement.
Et, de fait, il y a eu des tas d’actions terroristes en 1960 et en 1961, avant l’invasion de Playa Girón. Rogelio Polanco nous en parle.
Rogelio Polanco. Une vraie escalade du terrorisme, ces deux années-là, contre la Révolution triomphante. L’ironie, c’est l’antécédent des avions utilisés pour semer la terreur dans notre peuple : incursions aériennes illégales, depuis les USA, bombardements, largage de substances explosives, de propagande contre-révolutionnaire, etc. Tout ceci dans la plus grande impunité. Ainsi, de septembre à décembre 1960, on dénombre plus de cinquante violations de notre espace aérien rien que dans la province de La Havane, soit quasiment une tous les deux jours.
Selon le rapport de Lyman Kirkpatrick, l’inspecteur général de la CIA, les Etats-Unis ont largué durant cette période un total de six mille tonnes de tracts incitant à des sabotages, au terrorisme, contre des installations du pays.
Bien entendu, ces mitraillages et ces bombardements ont provoqué des victimes et des dommages matériels. Ainsi, en janvier 1960, le largage de quatre bombes de cinquante kilos sur Regla et Cojímar, tout près de la capitale, a mis en danger la population civile ; elle a été le fait de deux pilotes nord-américains, Bob Spining et Eduardo Whitehouse. Ou, le 11 février 1960, le largage de substance inflammable sur le village d’El Cano, dans la banlieue de la capitale. Ou le mitraillage en octobre et décembre aux environs de Rio Cristal, de Rancho Boyeros et d’Arroyo Arenas, toujours dans la capitale.
Venons-en aux sucreries, particulièrement visées. Nous avons entendu parler des attaques de 1959. les deux années suivantes, des dizaines de sucreries l’ont été, avec des plantations incendiées, de gros dommages matériels, et plusieurs victimes civiles. Prenons l’attaque de la sucrerie España, aujourd’hui España Republicana : l’avion attaquant, un Piper Comanche 250, a explosé en plein vol ; il était piloté par un autre Nord-Américain, Ellis Frost, accompagné par Onelio Santana Roque, ancien membre des forces répressives de la dictature. Les documents saisis dans l’avion ont permis de préciser qu’ils avaient déjà réalisé trois actions antérieures et qu’ils allaient toucher mille cinq cents dollars.
Il existait aussi des vols d’approvisionnement des bandes armées terroristes dans les montagnes. Ou encore les détournements d’avions sur les Etats-Unis. Les premiers à l’avoir fait étaient les anciens batistiens, tout au début de 1959, les criminels de guerre. Cette méthode, qui s’est poursuivie durant de nombreuses années, a fini par devenir un vrai boomerang pour les Etats-Unis qui n’ont quasiment rendu aucun avion piraté.
J’en ai quelques exemples. Le 14 octobre, quatre avions agricoles ont été piratés à Colón, dans la province de Matanzas. Mais il y a eu aussi des victimes : le 29 octobre 1960, la tentative de piratage d’un DC-3 d’Aerovías Q a entraîné la mort de l’escorte Cástulo Acosta Hernández, et les blessures du pilote Candelario Delgado Ruiz et d’un adolescent de quatorze ans, Argelio Rodríguez Hernández. Le 8 décembre, un autre DC-3, matricule CUT-172, de Cubana de Aviación, a été piraté : son pilote, Francisco Martinez Malo, a été assassiné en plein vol.
Ce même phénomène s’est répété avec des bateaux,
Quant aux sabotages terroristes, ils ont été aussi nombreux en 1960 et 1961. Contre des installations publiques, des cinémas, des théâtres, des écoles, des magasins, en vue, bien entendu, de semer la panique, la terreur dans la population.
Randy Alonso. Les médias en ont été victimes aussi.
Rogelio Polanco. Bien sûr. Le journal Revolución, la revue Bohemia.
Randy Alonso. Le journal La Calle.
Rogelio Polanco. Ou d’autres installations économiques : l’aqueduc du Cerro, les chambres froides de Jovellanos, la centrale thermoélectrique de Tallapiedra, les studios de télévision de CMQ, la raffinerie Belot, aujourd’hui Ñico López.
Mais il faut bien entendu rappeler deux actes terroristes particulièrement sinistres. Celui du cargo français La Coubre, le 4 mars 1960, dans le port de La Havane, au moment du déchargement d’armes et de munitions importées par la Révolution pour se défendre, justement, de ces actions terroristes et des agressions du gouvernement nord-américain. Le sabotage du cargo a provoqué plus de cent un morts, plus de deux cents blessés et de nombreux disparus. Un acte d’autant plus criminel qu’une deuxième explosion a eu lieu pendant que les gens venaient secourir les blessés. Notre peuple se rappellera que c’est de ce jour que date le slogan historique de La patrie ou la mort !
Randy Alonso. Ce sabotage a aussi coûté la vie de six marins français, ce qui prouve que le terrorisme mis en place par les Etats-Unis pouvait toucher des ressortissants d’autres pays.
Rogelio Polanco. Bien sûr. Le terrorisme, aujourd’hui comme hier, ne choisit pas ses victimes.
Le 13 avril 1961, le plus grand magasin du pays, El Encanto, de La Havane, est totalement détruit par un incendie criminel qui cause la mort d’une travailleuse et milicienne, Fé del Valle. Juste à quelques jours de l’invasion de Playa Girón.
Mais le terrorisme a aussi touché des cibles à l’étranger : à New York, à Miami, contre les bureaux de Cubana de Aviación. Ce phénomène prendra encore plus d’ampleur dans les années 60.
N’oublions pas les assassinats purs et simples d’innocents, dont des enfants et des adolescents : ainsi, le 7 avril 1960, le commandant Francisco Tamayo, tué par le traître Manuel Beaton Martínez ; ou le 10 octobre 1960, le tout jeune Reinaldo Múñiz-Bueno Machado, exécuté par une bande contre-révolutionnaire.
Justement, ces bandes contre-révolutionnaires, fournies et parrainées par les USA, ont provoqué la mort de nombreuses personnes.
Ou alors les groupes d’individus infiltrés qui ont causé de nombreuses victimes, ou les groupes réalisant des attaques pirates depuis des bateaux, comme celle du 13 mars 1961 contre la raffinerie de pétrole Hermanos Díaz, à Santiago de Cuba, qui a causé la mort du soldat René Rodríguez Hernández et blessé le soldat Roberto Ramón Castro.
Notre peuple ne peut oublier tous ces faits. D’entrée, la Révolution a dû être foncièrement antiterroriste, parce qu’elle en a été elle-même victime.
Lázaro Barredo. J’ai ici le fac-similé de la une du journal Revolución du 30 décembre 1960, qui rend compte de la découverte d’une fabrique de bombes et de l’arrestation de dix-sept terroristes agissant aux ordres de l’ambassade nord-américaine et posant des bombes dans des magasins et d’autres endroits. Parmi ces terroristes, on trouve deux personnages qui sont très amis des dirigeants nord-américains et d’autres pays : Carlos Alberto Montaner, journaliste, qui n’a pas été condamné à l’époque parce qu’il était mineur et qui s’est réfugié dans une ambassade latino-américaine pour s’enfuir du pays, et le fameux « ambassadeur des droits de l’homme », le prétendu paralytique, le soi-disant poète, Armando Valladares. Ces deux personnages posaient des bombes en 1960 dans des magasins, agissant sans la moindre pudeur en vulgaires terroristes.
Randy Alonso. Oui, des bombes dans des grands magasins, comme le rappelait Polanco. Il vaut la peine de rappeler à Bush et à son administration, qui taxent Cuba de pays terroriste, quelles sont les actions qu’ont menées leurs prédécesseurs contre le peuple cubain pendant plus de quarante ans, quels sont les vrais terroristes !
Les images du magasin El Encanto hantent encore les mémoires de tous ceux qui ont vécu cette période et sont aussi un témoignage exceptionnel pour les jeunes d’aujourd’hui.
(Vidéo avec vues de l’incendie d’El Encanto.)
Speaker. Alors qu’un peuple pacifique s’attelle au travail, à la construction d’une patrie nouvelle, des mains d’assassins posent des bombes incendiaires de fabrication nord-américaine dans le magasin nationalisé, El Encanto, qui donne du travail à des centaines de familles cubaines.
Ces meurtriers provoquent un incendie de grandes proportions en plein centre de la havane, mettant en danger un grand nombre de foyers cubains. Peu importe la vie d’enfants, de femmes, de personnes âgées ; peu importe la vie de nos ouvriers.
Le peuple s’est aussitôt mobilisé pour combattre le sinistre. Les milices, l’Armée rebelle et les pompiers sont parvenus à empêcher les flammes de gagner les maisons mitoyennes.
Les impérialistes ne savent pas qu’ils ne pourront jamais nous faire plier !
Par ces actes de barbarie, l’impérialisme prétend détruire nos richesses nationales, paralyser la production et promouvoir la pénurie. Il a perdu jusqu’au dernier espoir de confondre et de démobiliser l’opinion publique. Voilà pourquoi il décharge toute sa haine par ce terrorisme, cette violence et cette agression.
Reynol González (agent de la CIA). Oui, nous avons mis le feu à l’Encanto, aux Ten Cents, aux quais, à une des tours des quais, à la manufacture de cigares, à la papeterie de Puentes Grandes, à une manufacture de tabac du coin à La Havane et à plusieurs autres endroits que je ne me rappelle pas.
Mais, vrai, les Américains se sont joués de nous sur certains points. Ils nous utilisent pour maintenir l’état d’agitation interne et d’inquiétude par le sabotage par ceci ou par cela, pour pouvoir faire leurs plans. Autrement dit, on leur sert de couverture, tout simplement, après ça ils font leurs propres plans. C’est la réalité. Et ceux qui meurent ici et qui sont prisonniers ici, c’est nous, les Cubains.
Randy Alonso. C’était la couverture, comme reconnaissait cet agent de la CIA. Mais le véritable plan nord-américain, c’était de renforcer la terreur dans notre pays jusqu’au moment de l’invasion de Playa Girón, un épisode qui constitue un des moments culminants de la défense de la Révolution face aux agressions des USA. Juan Carlos Rodríguez, un bon connaisseur de ce thème, nous en parle.
Juan Carlos Rodríguez. L’invasion a été une opération de terrorisme, c’est indubitable, et ne peut être séparée de tout ce dont mes collègues ont parlé avant. Les sabotages dans les villes, comme celui-ci de l’Encanto que nous venons de voir, répondaient à un plan préparatoire qui devait aboutir au débarquement de Playa Girón. Il fallait créer un climat propice à ce débarquement.
Le sabotage de l’Encanto a eu lieu après la formation reçue par les équipes d’infiltration à la base Trax, au Guatemala, où se préparait la Brigade 2506, et le magasin a été réduit en cendres au moyen de deux bombes incendiaires que fabriquent uniquement l’industrie militaire des Etats-Unis. Ce n’est pas du matériel artisanal. Ces bombes ont été introduites par quelqu’un des équipes d’infiltration, auxquelles appartenait par exemple José Basulto, un terroriste bien connu de notre peuple.
On retrouve la même modalité dans le cas des soulèvements contre-révolutionnaires qui devaient préparer l’invasion. Et c’est dans ce contexte que s’inscrivent les nombreuses tentatives d’assassiner Fidel, notamment en introduisant un bacille botulinique de synthèse, fabriqué expressément dans ce but, quelques mois avant l’invasion, dans les laboratoires de la CIA. Je me demande : assassiner le Premier ministre d’un pays étranger, n’est-ce pas du terrorisme pur et simple ? Et pour introduire ce bacille, les USA n’ont même pas hésité à recourir à la mafia. Et s’ils l’on fait quelques semaines avant l’invasion, c’est parce qu’ils pensaient que cela découragerait les forces révolutionnaires, les milices, et faciliterait le succès de l’invasion.
L’invasion est sans aucun doute du terrorisme, et du terrorisme d’Etat, le fait du gouvernement nord-américain et de ses meilleurs spécialistes.
Ce sont eux qui ont recruté les futurs mercenaires à Miami, à New York, les ont installés dans des maisons préparées dans ce but, qui leur ont fait passer des examens médicaux, qui les ont conduits à la base Trax au Guatemala. Et n’allez pas croire que ces responsables ont dûment respecté les instructions d’Eisenhower selon lesquelles il ne fallait pas utiliser le territoire nord-américain pour ça : en effet, un bataillon complet s’est entraîné sur le lac Pontchartrain, à la Nouvelle-Orléans, et a descendu ensuite le Mississippi, et s’est ensuite dirigé vers l’est de Cuba, parce qu’il avait pour mission de débarquer à Imías dans le cadre de l’opération Mars, pour détourner l’attention et faire croire que le vrai débarquement aurait lieu dans cette région.
C’est quelque chose qu’on sait très peu. Eh bien, ce bataillon s’est entraîné aux USA : les tankiste se sont entraînés en Géorgie ; les hommes grenouilles à Vieques ; quant au chef principal de la Brigade 2506, c’était un colonel des marines, Jack Hawkins, et ce jusqu’au moment des combats ; et il existait un centre aux USA mêmes, à Quarter Eyes, au Pentagone, où ont dormi tous ces chefs militaires et les principaux impliqués dans cette invasion, et ce sont eux qui donnaient des ordres au prétendu chef cubain de la Brigade, San Román. Celui-ci n’a été qu’un pion des Nord-Américains.
Les autorités ont déclassifié très peu de documents sur ce qui s’est passé à Quarter Eyes durant les trois jours de l’invasion, parce que cela impliquait les trois armes des Etats-Unis.
La force aérienne tactique de la Brigade était dirigée par le général George (Reid) Doster, appartenant à la Garde nationale d’Alabama, et comptait seize B-26 peints aux couleurs des forces de l’air cubaines, en violation des conventions internationales sur la guerre, et ce sont ces avions qui ont bombardé par surprise trois aéroports cubains, sans déclaration de guerre préalable, ce qui en fait une attaque bel et bien terroriste. Au point que Fidel a affirmé le lendemain, durant l’enterrement des victimes : « Si le peuple des Etats-Unis a considéré l’attaque de Pearl Harbour comme un crime, comme un acte de trahison et de lâcheté, notre peuple a le droit de considérer cette attaque impérialiste d’hier comme un fait doublement criminel, doublement félon, doublement traître ! »
Le transport de la Brigade depuis le Nicaragua jusqu’aux côtes cubaines a été une opération relevant exclusivement de la marine. Là encore, peu de documents ont été déclassifiés sur cette opération, mais les envahisseurs en personne ont précisé qu’il y avait des navires, des sous-marins, des destroyers, des porte-avions, tout ça de la marine nord-américaine. C’est même une barge de débarquement des Etats-Unis, le San Marcos, qui a conduit jusqu’à la côte d’autres barges, les chars, les camions. Bref, une opération absolument militaire.
Quant aux pilotes cubains, ils ont été entraînés par des Nord-Américains, dont six ont même participé aux attaques, le dernier jour de l’invasion, et au bombardement au napalm d’un bataillon de miliciens, bien que les conventions militaires interdisent son emploi.
L’un de ces pilotes a été abattu, Leo Francis Baker. Et, pour ne pas reconnaître sa participation aux faits, le gouvernement nord-américain n’a jamais réclamé son corps, qui est resté dans une morgue cubaine pendant plus de vingt ans, jusqu’au jour où l’administration Carter a fait les démarches pertinentes. Autrement dit, des pilotes nord-américains ont participé directement aux attaques de Playa Girón.
Ce n’est pas tout. Le premier homme à avoir débarqué, c’est le chef des hommes grenouiles, un Nord-Américain, Grayston Lynch, et c’est lui qui a été le premier à tirer, blessant un milicien qui se trouvait à bord d’une jeep. Autrement dit, le premier tir est venu d’un Nord-Américain !
Le gouvernement nord-américain s’est toujours efforcé de dissimuler le plus possible sa participation à l’invasion et le caractère terroriste de celle-ci. Au cours d’une conférence universitaire tenue à Musgrove (Géorgie) en 1996, des Cubains qui y avaient participé tentaient de faire croire à leurs auditeurs que l’invasion avait été une espèce d’association entre la résistance anticastriste et le gouvernement nord-américain, une espèce de plan de coopération, si bien que Piero Gleijeses, professeur de l’Ecole des études internationales avancées de l’Université John Hopkins, a dû intervenir : « Ne nous égarons pas. L’opération de la baie des Cochons n’a pas été un accord de coopération entre les Etats-Unis et une prétendue résistance cubaine. Les Cubains qui y ont participé ont été un bon atout dans la main des Etats-Unis, qui n’ont tenu compte le moins du monde de leur avis. Ce sont les USA qui ont tracé les plans, ce sont eux qui ont choisi les chefs… Parler de la baie des Cochons, c’est parler d’une agression des Etats-Unis à Cuba. »
Quels étaient donc ceux qui venaient dans cette invasion, ce bon « atout » dont parle ce professeur ? Eh bien, une centaine d’envahisseurs possédaient des latifundios qui avaient été nationalisés et remis à ceux qui les travaillaient ; 67 étaient des propriétaires fonciers qui possédaient des dizaines de milliers d’appartement en location que la Révolution avait remis justement aux locataires ; 214 appartenaient à de riches familles qui contrôlaient des commerces, des banques et des usines ; 194 avaient fait parie des forces armées qui avaient été le soutien de la dictature ; 112 se consacraient à des « occupations » supprimées par la Révolution, comme le proxénétisme, le jeu, la drogue.
Mais il y avait aussi quelques assassins notoires du régime batistien, dont Ramón Calviñó Inzua, tortionnaire avéré, violeur de femmes, châtreur d’hommes… Une fois capturé, il a été jugé, et ses victimes sont venus témoigner au procès retransmis par la télévision. Et pourtant, savez-vous ce que je lis dans une revue de la Brigade 2506, Girón, publiée à Miami en octobre 1984, nº 1, p. 11 ? Ecoutez. Bien : Le mois de septembre dernier a marqué le vingt-troisième anniversaire de l’exécution devant le peloton de plusieurs « brigadistes » faits prisonniers : Ramón Calviño, Jorge King, Rafael Emilio Soler Puig. Que ces compagnons reçoivent le souvenir ému de ceux qui continuent de lutter pour la liberté de Cuba. » Ce sont ces gens-là, qui rappellent avec émotion des tortionnaires et des assassins de la tyrannie batistienne, qui se sont photographiés aux côtés du président des Etats-Unis. Entre terroristes, bien entendu, on se retrouve !
Quels dommages ont causé ces actions terroristes ? Je vais parler seulement des marais de Zapata, où a lieu l’invasion, un endroit absolument abandonné des dieux et des hommes avant la révolution : isolement absolu, misère, taux de mortalité très élevé. Et c’est la Révolution qui commence justement à améliorer la vie des habitants du coin.
Au moment de l’invasion, on tente bien entendu d’évacuer les familles de charbonniers qui vivaient dans le coin. Je vais vous lire le témoignage d’une de ces familles :
Quand il fait jour, on nous a fait partir en camion. Il y avait ma tante Amparo Ortíz, son mari, sa sœur María Ortiz et son mari, Cirta María García et sa famille, Dulce María, qui est ma sœur, et moi. Soudain, à l’endroit où se trouve le panneau de l’INRA, on a commencé à nous tirer dessus, le camion a fait une embardée et est allé dans le fossé. Dulce María est tombée sur mes jambes, du sang coulait de sa bouche et de son nez. Je regarde par là, et je vois Cira María García étendue sur la route, son mari à côté d’elle. Un peu plus loin, María Ortíz criait à cause des blessures. Regardez ce que vous avez fait à ma sœur, ai-je crié aux mercenaires quand ils m’ont fait monter sur un camion. Allez chercher ma sœur ! L’un d’eux m’a dit : « Je le regrette, elle est morte, on est en guerre. » Alors, je me suis mise à pleurer. J’aimais beaucoup ma sœur, elle allait fêter ses quinze ans, elle faisait partie des Jeunes rebelles et elle était en sixième. Un des mercenaires du camion, quand il a m’a vu en train de pleurer et de crier, a voulu me donner un billet de dix pesos, je ne sais pourquoi il l’a fait : « Je ne veux pas d’argent, je veux ma sœur ! »
Voilà donc le témoignage de cette jeune fille. Une photo est devenue très fameuse : on voit deux femmes allongées sur le ventre, sur une route, et un homme un peu plus loin. Cellequi est le plus, c’est Dulce María Martín, la sœur de cette femme qui m’a donné son témoignage, Nora Martín. Elle avait quatorze ans. Nora, après ça, a souffert d’hypertension toute sa vie, elle vit à Jagüey Grande. Sa mère a déclaré au cours de la Demande contre le gouvernement des Etats-Unis, montrant la photo de sa fille.
Le second cas, c’est celui de Nemesia Rodríguez, que nous connaissons tous pour l’histoire de petits souliers blancs, mais qui a une autre histoire à raconter. Elle se trouvait aussi sur un camion d’évacuation, et un B-26 de la brigade mercenaire descend en rase-mottes, poursuit le camion, le prend en alignement dans son collimateur. Elle raconte :
Alors, mon papa a dit à ma maman : Avertis le chauffeur de freiner, et il a poussé mon frère et lui a crié : Allonge-toi sur le plancher, l’avion va atterrir sur la route. Moi, j’étais assise sur un cageot contenant des boîtes de lait condensé et je portais mon neveu de six mois. Alors, l’avion a commencé à tirer. Ma maman est tombée, blessée au ventre et au bras ; une balle a blessé ma grande-mère à la colonne vertébrale et elle est restée invalide ; mon frère, une balle lui a traversé la jambe et le bras. Je me suis baissée et ma maman a ouvert les yeux. Je lui ai demandé si elle était blessée, elle a levé le bras pour essayer de me toucher, mais elle s’est évanouie. Alors, mon papa m’a fait descendre du camion. Si vous ne descendez pas maman, je ne descends pas, elle est vivante. Mon papa lui avait mis un drap dessus et on ne voyait pas les blessures du ventre, et c’est pour ça que je pensais qu’elle était vivante. Le vent a emporté le drap et j’ai vu la blessure, elle avait les tripes dehors.
Une fois qu’on l’a conduit vers Jagüey, elle témoigne :
Ma maman, on l’avait emportée à Jagüey, je voulais la voir, et on m’a amenée à la morgue. Je ne pouvais pas m’empêcher de me rappeler le moment où la rafale de vent avait emporté le drap et où j’avais vu cette horrible blessure, et ma mère toute ouverte.
Ce témoignage, elle me l’a donnée presque trente ans plus tard, et elle pleurait. Parce que les habitants des marais de Zapata qui ont souffert ces actes terroristes se souviennent de ces faits comme s’ils s’étaient passés hier. Ça les a traumatisés pour le restant de leur vie. Je me demande bien quel est le premier pays qu’il faudrait inscrire sur cette fameuse liste de terroristes.
Que venaient faire ces mercenaires ? Que venaient-ils libérer ? Surtout dans ces marais de Zapata où la Révolution avait fait une œuvre énorme en à peine un an et demi : des routes, des services médicaux, les premiers dispensaires, les trois routes qui traversent les marais pour supprimer l’isolement de l’endroit – de fait, beaucoup de femmes mouraient en couches parce qu’on ne pouvait pas les amener à un hôpital – les coopératives de crédit et de services. Le charbonnier commençait à devenir une personne, à entrer dans les circuits commerciaux. Il a pu avoir accès à des magasins de crédit, à acheter des vêtements, des chaussures, de la nourriture. Ses revenus se sont multipliés par dix. Son travail s’est humanisé, les sacs de charbon ont diminué de poids. Bref, une foule de mesures. En fait, le plus beau symbole de ce changement, c’est sans doute quelque chose que bien des gens ignorent : Fidel a passé la nuit de Noël de 1959 à l’endroit le plus pauvre de Cuba, ce marais de Zapata, chez un paysan, dans une pauvre chaumipère, et il a dû s’y rendre en hélicoptère, parce qu’il n’y avait pas de route pour y aller.
Je vais vous donne le témoignage de la fille, un bref témoignage. Le père a aussi témoigné, mais je me contente de celle de la fille, qui est maintenant une femme. On n’avait jamais vu qu’un Premier ministre allait passe la Noël chez des pauvres. Elle raconte : « J’étais une enfant, mais je m’en souviens très bien. Je me suis assise à côté de Fidel et j’ai bu une boisson maltée et du soda. La femme de Núñez Jiménez m’a fait cadeau de socquettes blanches. Après le dîner, un paysan du coin est venu jouer de la guitare. Je me souviens encore de la décima qu’il a chantée à Fidel : « Nous avons des routes grâce à Dieu et à Fidel. Aucune femme ne meurt plus en couches. Pour ton courage incomparable, merci Fidel. C’est toi, commandant, qui nous a libéré de ce fouet infernal. »
Randy Alonso. C’est bien ce que visait cette invasion mercenaire, financée et organisée par le gouvernement des Etats-Unis : liquider cette Révolution qui a rendu leurs droits à ces habitants ; noyer dans le sang la Révolution, ce qui a coûté environ cent cinquante morts et trois cent cinquante blessés en moins de soixante-douze heures. Si l’invasion mercenaire avait triomphé, il était prévu de liquider un certain nombre de révolutionnaires. Et les agresseurs n’ont pas hésité à recourir à des méthodes fascistes, comme celle de peindre à nos couleurs des avions ennemis au moment du 15 avril. Rappelons-nous Eduardo García Delgado, blessé durant le bombardement, qui écrit de son sang le nom de Fidel sur le mur. Et les attaques des 17, 18 et 19 avril dans les marais de Zapata.
L’invasion tentait de noyer dans le sang une Révolution sans précédent en Amérique et qui le reste dans le monde, et qui reste aussi la grande arête logée dans la gueule de l’empire qui s’efforce par tous les moyens de la liquider, peu importe les morts et les blessés, peu importe les actions terroristes.
Il serait bon d’écouter, en un jour pareil, le témoignage d’une mère qui a perdu son enfant sous la mitraille des mercenaires organisés et financés par le gouvernement des Etats-Unis. Un témoignage qu’elle a rendu devant le tribunal du peuple qui a entendu la Demande de Cuba contre le gouvernement des Etats-Unis.
Hectolidia Angulo. J’ai été lésée par les agressions de l’impérialisme car c’est lui qui donné les armes aux mercenaires de Playa Girón et les formés militairement. Et ces mercenaires ont tué une partie de ma famille.
Ma fille, Dulce María Martín et Nora, se trouvaient ce jour-là à Caletón, chez une tante, Amparo, ou plutôt une grand-tante. Il y avait aussi María Ortíz, la sœur d’Amparo, car celle-ci avait perdu, juste une semaine avant, un fils d’une attaque d’asthme. Ma famille se trouvait donc auprès d’elle pour la soutenir, la réconforter, car elle était seule avec son mari.
Alors, le 17 avril, les mercenaires ont débarqué. Le matin, entre tous les voisins, on a décidé d’évacuer les femmes et les enfants vers Jagüey Grande, car on pensait que les chemins seraient dégagés et qu’ils ne courraient aucun risque.
En sortant de Caletón, en prenant la route de Jagüey Grande, au croisiement de Playa Larga, les mercenaires qui s’étaient retranchés sont sortis et ont mitraillé le camion, un camion découvert, qui permettait de voir parfaitement que c’étaient des civils, des enfants, des femmes, et même un petit vieux…
Je vous présente une photo de ma famille morte sur la route. Celle-ci, c’est ma fille ; celle-ci, c’est ma tante, et celui-ci, là, c’est le mari de l’autre tante, Ramón. Voilà la photo de ma famille, détruite par le gouvernement impérialiste des Etats-Unis. C’est pour ça que je viens demander de toutes mes forces et que je dis à Fidel que nous sommes ici pour tout ce qu’il faut.
Randy Alonso. Avant la baie des Cochons, les bandes contre-révolutionnaires avaient servi de base de soutien à la préparation de l’invasion ; après, elles ont continué de semer la terreur parmi les paysans cubains et de semer le deuil dans notre population.
Je propose à Mendoza, qui a été avocat durant la Demande et qui a écouté des témoignages émouvants de mères, de frères, de pères des victimes de ces bandits, de nous parler de cette étape du terrorisme nord-américain contre notre peuple.
Juan Mendoza. Je dois dire tout d’abord qu’il ne s’agit pas d’un simple récit historique : ceci nous permet bel et bien d’identifier qui sont les vrais terroristes d’aujourd’hui.
Le banditisme est l’un des chapitres les plus importants du terrorisme des Etats-Unis contre Cuba. Si la population l’a qualifié de la sorte, c’est parce que c’étaient exactement ça : des bandits, par les crimes qu’ils ont commis, par leur lâcheté. De toute façon, le banditisme est un autre visage du terrorisme et d’un terrorisme d’Etat, parce qu’il était financé et soutenu par le gouvernement des Etats-Unis, un Etat étranger.
Tu l’as dit dans tes remarques préliminaires : il y a eu deux étapes du banditisme. La première, qui commence quinze mois après la victoire de la Révolution et s’étend jusqu’à Playa Girón ; la seconde, où ce phénomène prend une autre tournure et une autre ampleur, puisqu’il n’est définitivement liquidé qu’en 1965.
Et ce nouveau banditisme a touché pratiquement tout le pays. Ainsi, on dénombrait une vingtaine de bandes en Pinar del Río, avec 255 membres ; une dizaine dans la province de La Havane ; en Matanzas, 43, avec 605 membres ; en Las Villas, surtout dans l’Escambray, où ce phénomène a été le plus fort et le plus durable, on signalait 141 bandes, avec plus de 2 000 membres ; en Camagüey, 14 bandes ; en Oriente, 51.
Soit un total d’environ trois cents bandes et quatre mille membres.
Quelles ont été les victimes de cette forme de terrorisme ? Le peuple, bien entendu.
La Demande judiciaire présentée par le peuple nous a contraints d’aller au fond des choses et de dénombrer une par une chacune des victimes pour laquelle nous allions exiger une responsabilité pénale : le banditisme a causé 549 morts, sans parler de toute une série d’invalides. Selon des recherches historiques, il y aurait eu bien plus de victimes fatales, mais nous nous en tenons aux faits vérifiés avec preuves à l’appui.
Il est difficile de résumer en quelques minutes ce procès qui a duré vingt et un jours et que toute notre peuple a pu suivre. Mais je ne peux m’empêcher d’évoquer, à cause de son aspect dramatique, les assassinats, le 5 janvier 1961, de l’alphabétiseur bénévole Conrado Benítez et du paysan Eliodoro Rodríguez ; de l’instituteur Delfín Sen Cendré, en octobre 1961 ; de Manuel Ascunce Domenche et du paysan Pedro Lantigua, le 26 novembre 1961, des assassinats qui visaient à frapper deux valeurs clefs de la Révolution : d’abord, la Campagne d’alphabétisation, visant à apprendre à lire et à écrire à tous les Cubains ; ensuite, les paysans qui avaient bénéficié de cette importante réforme agraire et de la remise de terre par laquelle ils étaient devenus des propriétaires.
Comment oublier le témoignage si émouvant et si capital de la mère d’Ascunce Domenech, aujourd’hui décédée ?
L’assassinat de jeunes et d’adolescents, n’est-ce pas du terrorisme ? Nous avons pu constater que dix-sept enfants cubains avaient été victimes, dont huit sont morts. Je rappellerai en particulier les assassinats des enfants de Bolondrón, Yolando et Fermín, de onze et treize ans, et l’assassinat de Reinaldo Múñíz, d’à peine vingt-deux mois.
La liste de ces crimes serait interminable.
Pourquoi lions-nous donc banditisme et terrorisme ? En fait, il existe un lien historique prouvé entre le gouvernement nord-américain et ces individus qui opéraient dans notre pays, et les preuves en ont été apportées durant la Demande judiciaire.
Ainsi, le fameux Rapport de l’Inspecteur général de la CIA, Lyman Kirkpatrick, d’octobre 1961, déclassifié à la fin des années 90, un rapport auquel ont participé cent vingt-cinq fonctionnaires de la CIA et visant à analyser les causes de la défaite de l’invasion de Playa Girón.
Ce Rapport, donc, signale l’existence d’une opération secrète dite Silence, dans le cadre de laquelle la CIA a organisé douze opérations de largage d’armes, de munitions et d’explosifs aux bandes armées qui opéraient dans notre pays. N’est-ce pas du terrorisme d’Etat ?
Ou encore la fameuse réunion du 17 mars 1960 qui approuve le Programme d’action secrète contre le régime castriste, une réunion à laquelle assistent le vice-président Richard Nixon, le secrétaire au Trésor, le secrétaire à la Défense adjoint, le secrétaire d’Etat adjoint, un amiral de l’Etat-major interarmes, le directeur de la CIA, Allen Dulles, le général Goodpaster, et qui a adopte donc ce plan qui autorise la création à Cuba d’une organisation chargée d’actions secrètes et d’opérations de renseignements et qui assigne à la CIA les fonds nécessaires. Je vais vous citer une note du général Goodpaster qui me pousse toujours à la réflexion : « Le président a affirmé qu’il ne connaissait pas de meilleur plan pour faire face à la situation. Le gros problème, c’est les filtrations et le manque de sécurité. Tout le monde doit être décidé à jurer qu’il ne sait rien de tout ça. Rien de ce que nous faisons ne nous apparaître à la lumière. »
On dirait une réunion de mafieux : agissons, mais restons dans l’ombre, que nul n’en sache rien.
Je reconnais qu’il peut y avoir des haines entre des Etats. N’empêche que les agissements du gouvernement nord-américain révèlent une immoralité absolue en matière de politique. Alors, quand j’écoute cette administration décerner des prix aux bons et des punitions aux méchants, je me dis qu’elle est atteinte d’une amnésie politique et historique totale. Tout ce que nous venons de dire ici cet après-midi prouve éloquemment quels sont les vrais terroristes ! Et depuis longtemps !
Randy Alonso. Dans cette longue histoire d’assassinats et de terrorisme contre notre peuple, le banditisme occupe une place à part : plus de cinq cents victimes fatales. Et ni ceux qui ont vécu ces moments ni les nouvelles générations n’oublient ces crimes. Je vous propose d’écouter les témoignages de deux femmes, une épouse et une mère, victimes du banditisme, María Cristina Fuentes et Evelia Domenech.
María Cristina Fuentes. Le dommage que j’ai reçu des agresseurs et des bandes envoyées par les Etats-Unis, c’est que mon mari est parti un petit matin chercher du lait pour alimenter ses enfants, et que les bandits l’ont attrapé, l’ont torturé, l’ont frappé, et puis après ils sont venus chez nous, ils l’ont pendu à la porte de notre maison, me laissant cinq petits enfants à l’abandon, dont le plus âgé avait six ans, et un autre un peu plus âgé, un adolescent de quinze ans.
Juge. Comment s’appelait votre mari ?
María Cristina Fuentes. Mon mari s’appelait Bernardo Jiménez Núñez. Pensez un peu comme je me sentais après cette agression, avec mes six enfants sans père, sans argent, sans aliment, sans maison et sans rien.
Ç’a été monstrueux. Terrible, ils ne nous ont rien laissé pour vivre. Heureusement, les voisins ont fait une collecte qui m’a permis d’aller chez mon père, qui avait une petite chaumière et où vivait déjà ma sœur dans les pires conditions, comme moi, parce que les bandits avaient aussi tué son mari.
Mon père, vieux et malade, qui ne touchait que soixante pesos, pensez un peu quand je suis arrivée avec mes six enfants ! Ils dormaient par terre, ils vivaient dans le besoin, parce que les bandits ont tué leur père qui était le seul soutien que j’avais dans la vie.
Evelia Domenech. J’ai été touchée dans ce qu’une mère peut avoir de plus grand.
La politique agressive des Etats-Unis contre notre pays à travers les bandes contre-révolutionnaires, que tout le monde sait qu’elles étaient financées, soutenues et armées par la CIA, dans les années 60, dans la zone de l’Escambray, où se trouvait mon enfant, Manuel Ascunce Domenech, qui a été assassiné par une des bandes contre-révolutionnaires, le 26 novembre 1961.
Il se trouvait dans ces montagnes, faisant une des tâches les plus belles, les plus humaines, qui est d’enseigner. Dans ce cas, il apprenait à lire et à écrire aux paysans pour détruire l’analphabétisme qui existait dans notre pays, si grand, du fait de l’exploitation, des sévices qu’a toujours maintenus l’impérialisme yankee dans notre pays. Il a été assassiné par une de ces bandes qui s’est cruellement acharnée sur son corps d’adolescent, car il avait seulement seize ans. Et bien que les vies humaines n’aient pas de prix pour nous, l’impérialisme yankee est impardonnable, et j’estime qu’il doit payer pour tout le mal qu’il nous a fait et qu’il continue de nous faire, parce que je ne suis pas la seule, il y a des milliers de mères dans notre pays qui ont senti sa griffe criminelle plantée dans leurs entrailles.
Je suis tout à fait d’accord avec toutes ces demandes, pour qu’il paie tous les crimes qu’il a commis.
Randy Alonso. Telle est l’image de la mort, de la jeunesse assassinée de Manuel Ascunce, du savoir criminellement éteint sur le visage de ce jeune, comme c’est aussi le cas de Conrado Benítez, ou de celui de chacun des alphabétiseurs ou des paysans qui avaient voulu apprendre et qui n’ont pas pu le faire à cause des criminels parrainés, financés et armés par les Etats-Unis. Tel est le témoignage des mères qui ont perdu leurs enfants, des épouses qui ont perdu leurs compagnons de vie et de lutte. Tel est le témoignage d’un peuple qui a dû souffrir pendant plus de quarante ans l’agression, la terreur et la menace provenant du gouvernement nord-américain et des bandes qu’il a financées, des organisations qu’il a créées et de la cinquième colonne qu’il a tenté d’organiser dans notre pays. Tel est le résultat de l’agression terroriste qui dure depuis quarante-trois ans et que la nouvelle administration poursuit contre notre peuple.
Il reste encore bien des choses à dire. Demain, Hevia nous parlera de la façon dont l’échec de Playa Girón s’est converti en de nouveaux plans agressifs contre notre peuple, l’opération Mangouste, et nous ferons parvenir à nos auditeurs et téléspectateurs de nouveaux témoignages qui continueront de nous prouver éloquemment quels sont les vrais terroristes.
Avant de conclure, je voudrais relire quelques passages de l’éditorial du Granma :
Nous démolirons un par un les arguments, les tromperies, les trucs, les procédés démagogiques et les mensonges du sieur Bush.
Peu importe combien durera ce dur combat de notre longue guerre. Nous sommes lancés dans une grande bataille d’idées, dans une lutte sans précédent entre la vérité et le mensonge, l’ignorance et les connaissances politiques et historiques, la culture et la barbarie, la morale et la carence totale de principes et de valeurs éthiques, l’honnêteté et le cynisme ; entre l’oppression et la libération, la justice et l’injustice, l’égalité et l’inégalité, les cauchemars du passé et les rêves d’avenir, la destruction et la préservation de la nature, l’extermination et la survie de notre espèce.
Le 19 mai, jour de sa mort au champ d’honneur, notre peuple a commencé à monter une garde d’honneur devant la tombe de Martí. Et pour tous les temps.
Aucune force au monde, actuelle ou future, ne nous fera abdiquer, abandonner ou trahir nos nobles causes!
Et nous continuerons d’être, sans que rien ne puisse nous dévier de cette route, des amis inébranlables et des alliés du peuple nord-américain et de tout autre peuple du monde dans la lutte contre le terrorisme.
La lutte continue ! Bonsoir à tous.