RÉFLEXIONS
DU COMPAÑERO FIDEL
Inouï!
Dimanche 12 octobre, à l’initiative du président français, Sarkozy, les
pays de la zone Euro ont décidé d’un plan anticrise.
Lundi 13, on annonçait que les
pays européens lanceraient des quantités d’argent astronomiques sur le marché
financier pour en éviter l’effondrement. Devant ces nouvelles surprenantes, les
actions sont reparties à la hausse.
Conformément aux accords adoptés, l’Allemagne s’est engagée, dans le
cadre de ce plan de sauvetage, à injecter 480 milliards d’euros ;
Les actions des grandes sociétés qui n’étaient pas encore ruinées ont
remonté en flèche, cette hausse, bien que loin de compenser les pertes essuyées
durant les neuf journées tragiques, devant censément permettre au moins aux
politiciens et aux banquiers du capitalisme développé de se réoxygéner un peu.
Ce même jour, dans la soirée, le Premier ministre italien, Silvio
Berlusconi, invité d’honneur d’un banquet à
Un peu fort de café !
Toujours ce 13 octobre, le Prix Nobel d’économie était décerné à
l’Etasunien Paul Krugman, sans aucun doute un défenseur du système capitaliste
mais aussi un critique virulent du président Bush.
Le journal espagnol El Pais
reproduit, sous le titre de « Gordon fait bien les choses », un
article dans lequel Paul Krugman exprime différentes idées dont il vaut la
peine de reproduire certaines[1] :
Le
plus naturel à faire, donc…quand il s’agit de se colleter avec le problème de
la carence de capital financier est que les gouvernements en fournissent
davantage aux institutions financières en échange d’une prise de participation.
Cette
espèce de nationalisation partielle et temporaire…était aussi la solution que
Ben Bernanke, le président de
Or,
quand Henry Paulson, le secrétaire étasunien du Trésor, a annoncé son plan de
renflouement financier de 700 milliards de dollars, il a repoussé cette voie
évidente, en disant : « C’est ce que vous faites quand vous êtes en
faillite ». […]
Entre
temps, le gouvernement britannique a pris le taureau par les cornes et a agi
avec une vitesse étonnante pour régler le problème. […]
…M.
Paulson, après avoir sans doute perdu plusieurs précieuses semaines, a fait
marche arrière et prévoit maintenant d’acheter des actions plutôt que des
titres hypothécaires toxiques…
Comme
je l’ai dit, nous ne savons pas encore si ces mesures fonctionneront… Pourquoi a-t-il
fallu que cette vision claire des choses vienne de Londres et non de
Washington ?
On a
du mal à ne pas croire que la réponse initiale de M. Paulson a été biaisée par
l’idéologie. Après tout, rappelez-vous qu’il travaille pour une administration
dont la philosophie gouvernementale peut être résumée comme suit : « Tout
ce qui est privé est bon, tout ce qui est public est mauvais »…
[…]
D’un bout à l’autre du pouvoir exécutif, les professionnels compétents ont été limogés ;
il se peut bien qu’il ne reste plus personne au Trésor qui ait le poids et la formation
suffisants pour dire à M. Paulson que ce qu’il faisait était insensé.
Heureusement
pour l’économie mondiale, Gordon Brown et ses fonctionnaires font quelque chose
de sensé. Et ils nous ont peut-être montré la voie pour sortir de la crise.
Ainsi donc, jusqu’au Prix Nobel d’économie 2008 n’est pas sûr, de son
propre aveu, que ces mesures fonctionneront.
Tout ceci est inouï !
Mardi 14, les actions boursières ont chuté de quelques points. Les
sourires étaient déjà un peu plus crispés.
Les pays capitalistes européens, saturés de capacités productives et de
marchandises, ayant désespérément besoin de marchés pour éviter les grèves
d’ouvriers et de personnels des services, pleins d’épargnants qui perdent leur
argent et de paysans ruinés, ne sont donc pas en mesure d’imposer des
conditions et des solutions au reste du monde. C’est bien ce que proclament les
dirigeants d’importants pays émergents et de ceux qui, pauvres et mis à sac sur
le plan économique, sont victimes de l’échange inégal.
Aujourd’hui, mercredi 15, la valeur des actions boursières s’est de
nouveau effondrée.
McCain et Obama discuteront ce soir avec ardeur de la question
économique.
Dans la grande démocratie étasunienne, la moitié de ceux qui ont le
droit de vote n’est pas inscrite. Des inscrits, la moitié ne vote pas. Si bien
qu’à peine le quart des électeurs élit les gouvernants. Beaucoup de ceux qui
souhaiteraient peut-être voter maintenant pour le candidat noir ne peuvent pas
le faire.
Selon les sondages, ce dernier possède une large avance, mais nul n’ose
prédire les résultats.
Le 4 novembre sera un jour d’un grand intérêt pour l’opinion mondiale,
étant donné la crise économique dans laquelle se débat la société étasunienne.
En matière électorale, de la seule chose dont on peut être sûr, c’est
que Gordon Brown ne sera pas élu Premier ministre britannique aux prochaines
élections.
Fidel Castro Ruz
Le 15 octobre 2008
19 h 05
[1] Publié dans le New York Times de la veille sous le titre « Gordon Does Good » et traduit ici à partir de l’anglais (NdT).