RÉFLEXIONS DU COMPAÑERO FIDEL
La fourmi et l’éléphant
Après
J’ai choisi avec soin les données que j’ai introduites dans mon
prologue.
Dans les premières années de
Nous n’avons pas coutume de divulguer notre coopération avec d’autres
peuples, bien qu’on ne puisse empêcher la presse d’en parler parfois. Cette
coopération s’ancre dans des sentiments profonds qui n’ont rien à voir avec le
goût de la publicité.
Certains se demandent comme un petit pays sans grandes ressources peut
réaliser une tâche d’une telle ampleur dans des domaines aussi décisifs que
l’éducation et la santé sans lesquels la société actuelle est inconcevable.
L’être humain a créé les biens et les services indispensables dès le
moment où il a vécu en société, et celle-ci s’est développée depuis les formes
les plus élémentaires jusqu’aux plus avancées au long de plusieurs milliers
d’années.
L’exploitation de l’homme par l’homme – nous le savons tous ou du moins
nous devrions tous le savoir – a été la compagne inséparable de cette
évolution.
Les clivages dans la façon de saisir cette réalité ont toujours dépendu
de la place que chacun occupe dans la société. Cette exploitation paraissait
quelque chose de si naturel que l’immense majorité des gens n’en prit jamais
conscience.
C’est alors que le capitalisme était en plein essor en Angleterre, un
pays qui marchait à l’avant-garde avec les Etats-Unis et d’autres nations
d’Europe dans un monde déjà dominé par le colonialisme et l’expansionnisme,
qu’un grand penseur érudit en histoire et philosophie, Karl Marx, partant des
idées des philosophes et économistes allemands et anglais les plus prestigieux
de son époque, entre autres Hegel, Adam Smith et David Ricardo avec lesquels il
était en désaccord, élabora, écrivit et publia finalement en 1859 ses idées sur
les rapports de production et d’échange sous le capitalisme dans l’ouvrage
intitulé Contribution à la critique de
l’économie politique. Il continua de divulguer sa pensée dans le premier
tome de l’œuvre maîtresse qui le rendit célèbre, Le Capital, en 1867. Tout le reste de ce gros ouvrage fut publié à
partir de ses notes et annotations, par Engels qui partageait ses idées et qui,
tel un prophète, divulgua toute son œuvre après sa mort survenue en 1883.
Ce que Marx publia de son vivant constitue l’analyse la plus sérieuse
jamais écrite sur la société de classes et sur l’exploitation de l’homme par
l’homme. C’est ainsi que vit le jour le marxisme, fondement des partis et
mouvements révolutionnaires qui proclamaient le socialisme comme leur objectif,
y compris presque tous les partis sociaux-démocrates qui, quand éclata
L’une des vérités que le grand penseur exprimait d’un manière simple est
la suivante : « Dans la production sociale de leur existence, les
hommes entrent en des rapports déterminés,
nécessaires, indépendants de leur volonté, rapports de production qui
correspondent à un degré de développement déterminé de leurs forces productives
matérielles. […] Ce n’est pas la conscience des hommes qui détermine leur
être ; c’est inversement leur être social qui détermine leur conscience. A
un certain stade de leur développement, les forces productives matérielles de la
société entrent en contradiction avec les rapports de production existants… De
formes de développement des forces productives qu’ils étaient, ces rapports en
deviennent des entraves. Alors s’ouvre une époque de révolution sociale. […]
Une formation sociale ne disparaît jamais avant que soient développées toutes
les forces productives qu’elle est assez large pour contenir, jamais des
rapports de production nouveaux et supérieurs ne s’y substituent avant que les
conditions d’existence matérielles de ces rapports soient écloses dans le sens
même de la vieille société. »
Je ne pourrais expliquer en d’autres mots ces conceptions que Marx a
avancées d’une manière si claire et si précise qu’il suffit d’une explication
élémentaire du professeur pour que même un jeune Cubain, par exemple ceux qui
sont entrés le samedi 14 juin à l’Union des jeunes communistes, puisse en
saisir l’essence.
Sur le développement concret de la lutte des classes, Marx a écrit Les luttes de classes en France (1848-1850) et
Le 18 Brumaire de Louis Bonaparte,
deux excellentes analyses historiques qui
ravissent n’importe quel lecteur. C’était un vrai génie.
Lénine, profond continuateur de la pensée dialectique et des études de
Marx, écrivit deux œuvres fondamentales : L’Etat et
Si la pensée marxiste s’était bornée à la conception selon laquelle
« une formation sociale ne disparaît jamais avant que soient développées
toutes les forces productives qu’elle est assez large pour contenir », le
théoricien du capitalisme, Francis Fukuyama aurait eu raison d’affirmer que la
disparition de l’URSS marquait la fin de l’histoire et des idéologies et que
toute résistance au système de production capitalisme devait cesser.
A l’époque où le créateur du socialisme scientifique exposait ses idées,
les forces productives restaient encore à développer pleinement, la technologie
n’avait pas encore apporté les armes de destruction massive meurtrières qui
sont capables d’exterminer notre espèce, personne encore n’avait conquis
l’espace, on ne gaspillait pas sans limites les hydrocarbures et les
combustibles fossiles non renouvelables, on ignorait le phénomène des
changements climatiques dans une Nature qui semblait s’ouvrir devant l’homme à
l’infini, on ne savait rien d’une éventuelle crise mondiale des aliments, maintenant
qu’on veut les partager entre d’innombrables moteurs à combustion et une
population six fois supérieure au milliard d’habitants peuplant la planète
l’année de la naissance de Karl Marx.
L’expérience de Cuba socialiste se déroule alors que la domination
impérialiste s’est étendue à toute
Quand je parle de conscience, je ne me réfère pas à une volonté capable
de changer la réalité, mais, au contraire, à la connaissance de la réalité
objective qui détermine la conduite à suivre.
Des dizaines de millions de personnes étaient mortes dans la guerre
provoquée au milieu du XXe siècle par le fascisme qui naquit des
entrailles antimarxistes du capitalisme développé que Lénine avait prévu.
A Cuba, comme dans d’autres pays du Tiers-monde, la lutte de libération
nationale sous la conduite des couches moyennes et de la petite bourgeoisie, et
celle que les secteurs les plus avancés de la classe ouvrière et du paysannat
livraient déjà pour le socialisme convergèrent et se renforcèrent mutuellement.
Les contradictions idéologiques et de classe affleurèrent aussi. Les facteurs
objectifs et subjectifs variaient aussi considérablement d’un processus à
l’autre.
La dernière guerre mondiale avait aussi engendré les Nations Unies et
d’autres organismes internationaux dans lesquels beaucoup de gens virent
l’émergence d’une nouvelle conscience sur notre planète. Ils se trompaient.
Le fascisme, dont Hitler en personne baptisa l’instrument : Parti
national-socialiste, a ressurgi, plus puissant et plus menaçant que jamais.
Que décide l’impire afin de rivaliser avec
Cuba sur notre continent ? Expédier un énorme bateau converti en hôpital
flottant qui passe dix jours dans chaque pays.
Cette méthode peut aider assurément un certain nombre de personnes, mais
il s’en faut de beaucoup qu’elle règle les problèmes de chaque pays ; elle
ne compense pas non plus le vol de cerveaux ni ne peut former les spécialistes
nécessaires pour prêter de vrais services médicaux chaque jour de la semaine et
de l’année. Tous les porte-avions réunis, qui sont maintenant des instruments
d’intervention militaire sur les divers océans de
Notre pays a prouvé qu’il peut résister à toutes les pressions et aider
d’autres peuples.
Je réfléchissais sur l’ampleur de notre coopération non seulement en
Bolivie, mais en Haïti, dans les Caraïbes, dans plusieurs pays d’Amérique
centrale et d’Amérique du Sud, d’Afrique et même de la lointaine Océanie, à
vingt mille kilomètres de distance. Je me souvenais aussi des misions de la
brigade Henry Reeve prévue pour de graves catastrophes naturelles, voyageant
sur nos propres avions qui transportent des personnels et d’autres ressources.
La possibilité – dont j’avais parlé – d’opérer gratuitement de la vue
chaque année un million de Latino-américains et de Caribéens n’est pas loin
d’être atteinte. Les Etats-Unis peuvent-il donc émuler avec Cuba ?
Nous utiliserons les ordinateurs,
non pour fabriquer des armes de destruction massive et exterminer des
vies, mais pour transmettre des connaissances à d’autres peuples. Du point de
vue économique, l’épanouissement par
Notre petit pays résistera.
Bref, la fourmi peut plus que l’éléphant !
Fidel Castro Ruz
Le