Réflexions du compañero Fidel
À faire pâlir Goebbels
J’ai suivi hier la Table ronde
télévisée qui a analysé, entre autres thèmes, l’Opération Peter Pan, l’un des
actes d’agression morale les plus répugnants jamais commis contre notre pays.
La question de la puissance paternelle est extrêmement sensible. Ce fut un coup
bas répugnant. Dans un roman que j’ai lu bien des années après, Mikhaïl
Cholokhov évoque un épisode semblable contre la révolution d’Octobre.
L’architecte de cette
opération contre Cuba fut monseigneur Walsh, de l’Eglise catholique
étasunienne, qui dépendait de l’évêque de Miami.
L’opération se déroula en
1960. Notre Révolution n’avait mis aucun obstacle au départ de ceux qui
voulaient partir, car il s’agissait de l’œuvre volontaire d’un peuple libre. La
riposte de l’impérialisme, parmi de nombreuses autres agressions graves, fut
l’Opération Peter Pan.
Quand Taladrid commentait ce
fait, il a mentionné un professeur d’économie, Ángel Fernández Varela. Je me
suis rappelé qu’en terminale, au lycée de Belén, un professeur laïc donnait des
classes d’économie politique. Il ne s’agissait pas, bien entendu, d’un cours de
marxisme-léninisme – le fameux point idéologique évoqué dix-huit ans plus tard
par l’OEA pour nous expulser – mais de classes simples et relativement
élémentaires sur l’économie politique bourgeoise. Qu’étions-nous d’ailleurs, nous
les élèves blancs de cette école ? En tout cas, ce professeur ne manquait
jamais de nous faire classe deux ou trois fois par semaine.
Ce que j’ai entendu à la Table
ronde m’a surpris. Serait-ce donc ce professeur-là ? me demandais-je. J’ai téléphoné à Taladrid en quête de
données. Luis Báez assure également que j’ai rencontré ce professeur quelque
part à La Havane en 1959 et que j’avais critiqué son attitude, mais je ne me
souvenais pas de ce détail.
Walsh fut décorée voilà
quelques jours à titre posthume pour sa « prouesse » dans l’Opération
Peter Pan. Il avait affirmé voilà des années avoir reçu des appels téléphonique
pour le démarrage de l’Opération et qu’il l’avait coordonnée avec la CIA.
Álvaro F. Fernández, fils de
Fernández Varela, a raconté fin mai dans la revue électronique Progreso Semanal : « …
Quelques années avant de mourir à Miami, mon père nous a réunis, ma mère, ma
sœur María, son mari et moi-même, et nous a dit qu’il avait été l’un des
rédacteurs de la fausse loi qui déclencha l’hystérie de la "suppression de
la puissance paternelle". C’est pour ça que je sais sans le moindre doute
que l’Opération Peter Pan a été une action immorale et sinistre conçu et rêvée
par la CIA avant l’invasion de la baie des Cochons… »
Un
agent de la CIA apporta le faux projet de loi de Miami à La Havane. Ángel
Fernández Varela en personne a raconté à la revue Contrapunto qu’il avait travaillé pour la CIA de 1959 à 1968.
Chacun
des quatorze mille enfants impliqués dans ce drame a été marqué par le
traumatisme. Ils étaient issues fondamentalement des couches moyennes ;
ils n’étaient pas fils de propriétaires terriens ni de grands bourgeois. À quoi
bon les entraîner dans ce drame ? L’ambassade yankee de La Havane, encore
ouverte à l’époque, délivrait les visas d’entrée aux États-Unis ; ceux qui
correspondaient aux enfants Peter Pan arrivaient par paquets entiers à La
Havane et étaient ensuite remplis à leurs noms. Aucun de ces enfants n’avait
besoin d’être « sauvé ». Durant de nombreuses années, la Révolution a
facilité le départ d’environ un million de personnes à destination, dans leur grande
majorité, des États-Unis, le pays le plus riche, celui qui encourage le vol de
cerveaux et le pillage des personnes instruites et de la force de travail
qualifiée.
Les
États-Unis ne seraient en mesure de le faire avec aucun autre pays
latino-américain. À qui cette diabolique opération clandestine pouvait-elle
profiter ?
María de los Ángeles Torres,
professeure associée de sciences politiques à l’Université DePaul, de Chicago, qui
fut enfant Peter Pan mais n’est pas révolutionnaire, a demandé à la CIA de
déclassifier près de mille cinq cents documents relatifs à l’Opération, mais
celle-ci a refusé au motif de la sécurité nationale. L’affaire pue tant que
l’Agence ne veut pas la remuer.
Malgré ce refus, la
professeure Torres a obtenu que la bibliothèque présidentielle Lyndon B. Johnson
lui donne accès à un document où l’administration étasunienne repoussait une
proposition du Haut Commissaire des Nations Unies aux réfugiés de prendre en
charge le voyage des parents dont les enfants avaient été envoyés seuls aux États-Unis.
Ce document a été publié dans la presse de ce pays il y a plus de quinze ans.
Peter Pan fut une manœuvre
cynique qui aurait fait pâlir Goebbels en personne, le ministre de la propagande
nazi.
Fidel Castro Ruz
Le 11 juin 2009
16 h 40