Réflexions du compañero
Fidel
CE QUI S’EST VRAIMENT PASSÉ AU SOMMET DE COPENHAGUE
Ce sont les jeunes que l’avenir concerne plus que quiconque.
Encore tout récemment, la discussion portait sur le type de société où nous
vivrions. Aujourd’hui, l’on discute si la société survivra…
Il ne s’agit pas là de phrases dramatiques. Il faut s’accoutumer aux faits
réels. L’espoir est la dernière chose que les êtres humains peuvent perdre.
C’est la vérité en main que des hommes et des femmes de tous âges, mais surtout
des jeunes, ont livré au Sommet de Copenhague une bataille exemplaire, offrant
ainsi au monde une grande leçon.
Le principal, maintenant, c’est que l’on sache le plus possible à Cuba et
dans le monde ce qui s’est passé à Copenhague. La vérité possède une force qui
surpasse l’intelligence médiatisée et bien souvent désinformée de ceux qui ont
en main les destinées du monde.
Si quelque chose d’important a été obtenu dans la capitale danoise, c’est
que l’opinion mondiale a pu observer à travers les médias le chaos politique
qui s’y est engendré et le traitement humiliant infligé à des chefs d’État ou
de gouvernement, à des ministres et à des milliers de représentants de
mouvements sociaux et d’institutions qui, pleins d’illusions et d’espoirs, se
sont rendus au siège du Sommet, à Copenhague. La brutale répression contre des
manifestants pacifiques par la force publique rappelait la conduite des troupes
d’assaut nazies qui occupèrent le Danemark en avril 1940. Ce que personne ne
pouvait imaginer, c’est que, le
À la fin du discours du seizième élu, Evo Morales, fort de toute l’autorité
de son origine aymara, frais réélu par 65 p. 100 des votants et jouissant du
soutien des deux tiers de la Chambre et du Sénat bolivien, a demandé la parole.
Le président danois n’a pas eu d’autre remède que de la lui céder à la demande
des autres délégations. Quand Evo a conclu sa sage et profonde intervention, le
Danois a dû la concéder ensuite à Hugo
Chávez. Les deux interventions passeront à l’Histoire comme des exemples de
discours brefs et opportuns. Une fois leur tâche dûment remplie, tous deux ont
regagné leur pays respectif. Mais quand Obama est sorti de scène, il n’avait
pas encore conclu la sienne au pays siège du Sommet.
Dans la nuit du 17 au 18, le Premier ministre danois et de hauts
représentants des États-Unis s’étaient réunis avec le président de la
Commission européenne et les dirigeants de vingt-sept pays pour leur proposer,
au nom d’Obama, un projet d’accord à l’élaboration duquel aucun autre dirigeant
du reste du monde ne devait participer. C’était là une initiative
antidémocratique et virtuellement clandestine qui ignorait des milliers de
représentants de mouvements sociaux, d’institutions scientifiques, religieuses
et les autres invités au Sommet.
Dans la nuit du 18, alors que de nombreux chefs d’État étaient déjà partis,
les représentants des pays ont attendu jusqu’à trois heures du matin du 19 la
reprise des séances et la clôture de la réunion. Pendant toute la journée du
18, Obama avait soutenu des réunions et des conférences de presse. Tout comme
les dirigeants européens. Puis ils sont partis.
Il s’est alors passé quelque chose d’insolite : le 19, à trois heures
du matin donc, le Premier ministre danois a convoqué la clôture du Sommet. Les
ministres, fonctionnaires, ambassadeur et personnels techniques étaient les
seuls à représenter leur pays.
Mais un groupe de représentants de pays du Tiers-monde qui contestaient la
tentative d’Obama et des plus riches de la planète de présenter comme un accord
consensuel du Sommet le document imposé par les États-Unis a livré cette
nuit-là une bataille étonnante.
La représentante vénézuélienne, Claudia Salerno, pleine d’une énergie
impressionnante, montra le sang qui coulait de sa main droite à cause des coups
qu’elle avait dû frapper sur la table pour pouvoir exercer son droit de parole.
Le ton de sa voix et la dignité de ses arguments sont inoubliables.
Le ministre cubain des Relations extérieures a prononcé un discours
énergique d’un millier de mots dont j’extrais plusieurs paragraphes pour les
inclure dans mes Réflexions :
« Le document dont
vous avez nié à plusieurs reprises l’existence, monsieur le Président, apparaît
maintenant… Nous avons vu des versions qui circulent d’une manière subreptice
et qui se discutent en petits conciliabules secrets.
« … je regrette
profondément la façon dont vous avez conduit cette Conférence.
« …Cuba juge
extrêmement insuffisant et inadmissible le texte de ce projet apocryphe.
L’objectif de 2ºC est inacceptable, car il aurait des conséquences
catastrophiques incalculables…
« Le document que
vous nous présentez ne contient, hélas, aucun engagement de réduction des
émissions de gaz à effet de serre.
« Je connais les
versions antérieures qui se sont négociées elles aussi à travers des procédés
contestables et clandestins, en coteries fermées…
« Le document que
vous nous soumettez maintenant omet justement les phrases clefs déjà bien
maigres et insuffisantes de cette version-là.
« …pour Cuba, cet
objectif est incompatible avec le critère scientifique universellement accepté
selon lequel il est urgent et incontournable de réduire les émissions d’au
moins 45 p. 100 d’ici à 2020 et de non moins de 80 à 90 p. 100 d’ici à 2050.
« Toute
proposition de poursuite des négociations en vue d’adopter à l’avenir des
accords de réduction des émissions doit inclure impérativement le concept selon
lequel le Protocole de Kyoto est toujours d’actualité. […] Votre papier,
monsieur le Président, est l’acte de décès du Protocole de Kyoto, et ma délégation
s’y refuse.
« La délégation
cubaine tient à souligner la primauté du principe des "responsabilités
communes mais différenciées" en tant que concept clef des futures
négociations. Votre papier n’en dit mot.
« Ce projet de
déclaration omet des engagements concrets en matière de financement et de
transfert de technologies vers les pays en développement dans le cadre des
obligations contractées par les pays développés au titre de la Convention cadre
des Nations sur les changements climatiques. […] Les pays développés qui imposent
leurs intérêts par ce document interposé fuient tout engagement concret.
« …Ce que vous
appelez, monsieur le Président, un "groupe de leaders représentatifs"
constitue à mes yeux une violation grossière du principe de l’égalité souveraine
des États que consacre le Charte des Nations Unies.
« Je vous demande
formellement, monsieur le Président, de faire en sorte que ma déclaration fasse
partie du rapport final sur les travaux de cette lamentable, de cette honteuse
Quinzième Conférence des Parties.
On
n’avait concédé qu’une heure aux représentants des États pour émettre des
opinions, ce qui a provoqué des situations compliquées, honteuses et
désagréables.
Il
s’ensuivit un long débat durant lequel les délégations des pays développés ont
exercé de fortes pressions pour que la Conférence adopte ce document comme
résultats final de ses délibérations.
Un
nombre réduit de pays a insisté fermement sur les sérieuses carences et ambiguïtés
du document impulsé par les États-Unis, en particulier sur l’absence
d’engagement de la part de pays développés en matière de réduction des
émissions de carbone et de financement permettant aux pays du Sud de mettre en
place des mesures d’atténuation et d’adaptation.
C’est au terme de
discussions longues et extrêmement tendues que la position des pays de
l’Alliance bolivarienne des peuples de Notre Amérique (ALBA) et du Soudan en
tant que président en exercice du Groupe des 77 a fini par
prévaloir : le document en question
était inacceptable par la Conférence.
Devant le manque de consensus évident, la Conférence
s’est bornée à « prendre note »
de l’existence de ce document en tant que position d’un groupe d’environ
vingt-cinq pays.
Une fois cette décision adoptée à
Ils ont informé cet après-midi :
« …comme ceux qui ont
participé à l’élaboration du document aussi bien que ceux qui, comme le
président des USA, se sont empressés d’annoncer son adoption par le Sommet… ne
pouvaient refuser la décision de celui-ci de seulement "prendre note"
du prétendu "Accord de Copenhague", ils ont tenté de proposer un
procédé par lequel d’autres pays Parties qui n’avaient pas participé à cette
manigance pourraient la seconder et y adhérer, afin de donner des dehors de
légalité à cet accord, ce qui aurait pu de fait préjuger du résultat des
négociations à venir.
« Cuba, le Venezuela et
la Bolivie se sont opposés de nouveau fermement à cette tentative tardive,
avertissant que ce document non entériné par la Conférence n’avait pas de
caractère légal, qu’il n’existait pas comme document des Parties et qu’on ne
pouvait établir aucune règle pour le faire censément adopter…
« Voilà dans quel esprit
que se sont conclues les sessions de Copenhague, sans adoption de ce document
préparé subrepticement ces derniers jours, sous la conduite idéologique évidente
de l’administration étasunienne… »
Demain,
notre attention sera centrée sur l’Assemblée nationale.
Lazo, Bruno et le reste de la délégation arriveront vers
Fidel Castro Ruz
Le