Réflexions du compañero Fidel
L’EMPIRE ET LA GUERRE
J’ai brièvement signalé, voilà deux jours, que l’impérialisme ne pouvait
pas solutionner le gravissime problème de la consommation des stupéfiants qui
ravage la population du monde. Je tiens à aborder aujourd’hui un autre point
que je juge capital.
On peut parer au danger d’une attaque de la Corée du Nord par les
États-Unis, à la suite de l’incident qui a récemment éclaté dans les eaux de ce
pays, si le président de la République populaire de Chine décide d’utiliser son
droit de veto, même si ce pays n’aime absolument pas exercer cette prérogative
dans les accords discutés au Conseil de sécurité des Nations Unies.
Il existe un second problème, encore plus grave, face auquel les États-Unis
n’ont pas de réponse : le conflit créé autour de l’Iran. Quelque chose que l’on
voyait venir clairement à partir du discours prononcé par le président Barack
Obama, le
Dans des Réflexions que j’avais écrites quatre jours plus tard, une fois en
possession de la version officielle de son discours, j’en avais cité de nombreux
passages pour en signaler l’importance. J’en reprends ici quelques-uns :
« Nous nous rencontrons en une période de tension entre les États-Unis
et les musulmans partout dans le monde…
« …le colonialisme … a privé de
nombreux musulmans de leurs droits et de leurs chances… une guerre froide où
des pays à majorité musulmane ont été trop souvent considérés comme des
sous-traitants, sans égard pour leurs propres aspirations. »
Un raisonnement et d’autres vraiment impressionnants dans la bouche d’un
président afro-étasunien, des vérités aussi évidentes que celles que contenait
la Déclaration de Philadelphie du
« Je suis venu chercher un nouveau
commencement entre les États-Unis et les musulmans du monde entier, qui se
fonde sur un intérêt et un respect mutuels…
« Comme le dit le saint Coran :
"Sois conscient de Dieu et dis toujours la vérité." »
« En tant que président des États-Unis, je
considère qu’il est de ma responsabilité de lutter contre les stéréotypes sur
l’Islam, où qu’ils apparaissent.
Il a continué à égrener des thèmes scabreux, compte tenu de l’univers de
contradictions insolubles où se débat la politique des USA.
« Au milieu de la Guerre Froide, les
États-Unis ont joué un rôle dans le renversement d’un gouvernement iranien
démocratiquement élu. Depuis la révolution islamique, l’Iran a joué un rôle
dans des actes de prises d’otages et de violences contre des Américains, militaires
et civils.
« Les liens solides entre l’Amérique et
Israël sont bien connus. Cette relation est indestructible.
« Beaucoup attendent, dans des camps de
réfugiés en Cisjordanie, à Gaza et aux alentours, une vie de paix et de
sécurité qu’ils n’ont jamais pu mener.
Nous savons aujourd’hui qu’une pluie de phosphore blanc et d’autres engins
inhumains et cruels lancés avec une furie vraiment nazi-fasciste tombe
fréquemment sur la population de Gaza. Il n’empêche : les affirmations
d’Obama semblaient vibrantes et parfois sincères, tandis qu’il ne cessait de
les répéter au milieu de l’agitation fébrile qu’engendre toute arrivée à heure
fixe de l’avion Number One des forces de l’air étasuniennes.
Hier, 31 mai, la communauté internationale a été bouleversée par l’assaut,
en eaux internationales, à des dizaines de milles de la côte de Gaza, de
presque une centaine de soldats des forces spéciales d’Israël, débarqués d’hélicoptères
en pleine nuit, tirant sans sommation sur des centaines de personnes pacifiques
de différentes nationalités, causant – selon la presse – non moins de vingt
morts et des dizaines de blessés. Parmi les personnes attaquées, qui
apportaient des marchandises aux Palestiniens assiégés dans leur propre patrie,
il y avait des Étasuniens.
Quand Obama a parlé à l’Université islamique d’Al-Azhar du « renversement
d’un gouvernement iranien démocratiquement élu », il a aussi ajouté :
« Depuis la révolution islamique, l’Iran a joué un rôle dans des actes de
prises d’otages et de violences contre des Américains, militaires et
civils », il se référait au mouvement révolutionnaire déclenché par
l’ayatollah Rouhollah Khomeiny, qui, de Paris, sans une seule arme, avait
liquidé les forces armées du plus puissant gendarme sur lequel les USA pouvait
compter dans le sud de l’Asie. Il était difficile que la plus puissante nation
du monde résiste à la tentation d’y installer un des ses bases militaires, au
sud de l’URSS.
Voilà plus de cinquante ans, les États-Unis y avaient écrasé une autre
révolution absolument démocratique, en renversant le Premier ministre Mohammad
Mossadegh, qui avait été élu le
Il avait déclaré : « Nos longues années de négociations avec des
pays étrangers n’ont pas donné de fruits à ce jour. » Il voulait parler,
bien entendu, des grandes puissances capitalistes qui contrôlent l’économie
mondiale.
L’Iran, devant l’intransigeance de la British Petroleum, qui s’appelait
alors l’Anglo-Iranien Oil Company, prit possession de ses installations.
Le pays n’était pas en mesure de former des techniciens. La Grande-Bretagne
avait retiré son personnel qualifié et avait répondu en bloquant l’envoi de
pièces et les marchés. Elle dépêcha sa flotte de guerre en formation de combat.
La production pétrolière de l’Iran diminua de ce fait de
Les États-Unis n’ont jamais rien fait d’autre avec les autres pays. Dès sa
formation sur les sols les plus riches de la planète, cette nation n’a jamais
respecté les droits des populations indigènes qui y avaient vécu durant des
millénaires ni de populations africaines qui furent importées comme esclaves
par les colonisateurs anglais.
Je suis sûr, toutefois, que des millions d’Étasuniens intelligents et
honnêtes comprennent ces vérités.
Le président Obama aura beau prononcer des centaines d’allocutions pour
tenter, en forçant la vérité, de concilier des contradictions qui sont
inconciliables, songer à la magie de phrases bien articulées tout en faisant
des concessions à des personnalités et à des groupes absolument immoraux,
concevoir pour lui-même des mondes fantastiques que des conseillers sans
scrupules, connaissant ses tendances, sèment dans son cerveau, rien n’y fera...
Deux questions incontournables : Obama pourra-t-il jouir des émotions d’une
seconde élection présidentielle sans que le Pentagone ou l’État d’Israël, qui
se moque dans son comportement des décisions des États-Unis, utilise ses armes
nucléaires en Iran ? Comment sera la vie sur notre planète après ça ?
Fidel Castro Ruz
Le 1er juin 2010