Réflexions
du compañero Fidel
UN
ÉNORME PANIER DE CRABES
Voilà ce qu’a été la réunion du G-20 qui a commencé
hier à Séoul, capitale de Corée du Sud.
Qu’est-ce que le G-20 ? se demanderont bien des
lecteurs saturés d’acronymes. Une invention de plus du puissant Empire et de
ses alliés les plus riches qui avaient déjà créé le G-7, à savoir les USA, le
Japon, l’Allemagne,
Une autre réunion internationale de haut niveau se
déroule presque simultanément au Japon : celle de l’APEC, autrement dit le
Forum de coopération économique Asie-Pacifique, qui concerne des pays tous
baignés par les eaux de l’océan Pacifique et ayant d’importants échanges
commerciaux. Si le lecteur a la patience d’ajouter, donc, au groupe antérieur
Ces réunions internationales abordent les aspects
clefs de l’économie et des finances du monde. Quant au Fonds monétaire
international et à
Il est important de rappeler qu’à la fin de
C’est du 1er au 22 juillet 1944, dans un
hôtel isolé, quoique vaste et confortable, de Bretton Woods, une petite
localité de l’État du New Hampshire, au nord-est des USA, que l’Organisation
des Nations Unies, récemment créée, tint une
Conférence monétaire et financière.
Et là, les États-Unis obtinrent le privilège
exceptionnel de voir leur papier-monnaie devenir devise internationale,
convertible en or au taux fixe de 35 dollars l’once Troy. Étant donné que
l’immense majorité des pays avaient déposé leurs réserves de devises dans les
banques étasuniennes, ce qui équivalait à faire des prêts considérables au pays
le plus riche du monde, on avait donc fixé une limite à l’impression de
papier-monnaie de sa part, ce qui signifiait au moins que la valeur des
réserves des autres pays déposées dans ces banques était garantie.
C’est à partir de ce privilège énorme – limité
néanmoins par le fait que l’émission de dollars devait s’ajuster à leur
convertibilité en or – que le puissant pays accrut son contrôle sur les
richesses de la planète.
Mais les équipées militaires et les guerres des
États-Unis, en alliance avec les anciennes puissances coloniales, en
particulier le Royaume-Uni,
C’est durant la guerre génocidaire que les USA
lancèrent contre le Vietnam – où ils faillirent recourir à des armes nucléaires
– que le président étasunien prit sans aucun scrupule la décision unilatérale
d’annuler la convertibilité du dollar en or. Dès lors, les USA firent
fonctionner la planche à billets sans aucune limite. Et ils abusèrent à ce
point de leur privilège que l’once Troy est
passée de 35 dollars à plus de 1 400 dollars aujourd’hui, soit au
moins quarante fois la valeur qu’elle eut pendant vingt-sept ans, jusqu’en 1971 où Richard Nixon adopta cette décision
funeste.
Ce que la crise économique qui frappe aujourd’hui la
société étasunienne a de pire, c’est que les mesures anticrises qui avaient
fonctionné à d’autres moments de l’histoire du système capitaliste impérialiste
des USA ne sont pas parvenues à relancer la marche normale de l’économie. Alors
que l’État accumule une dette qui avoisine les 14 billions de dollars, soit la
valeur du PIB du pays, le déficit fiscal persiste ; les énormes dépenses engagées pour sauver les
banques et la réduction des taux d’intérêt à quasiment 0% parviennent juste à
maintenir le taux de chômage au-dessous de 10 p. 100, sans réduire la quantité
de familles dont les logements font l’objet de liquidations. Le budget que les
USA consacrent à la défense, déjà gigantesque, ne cesse de croître pour dépasser
d’ores et déjà ceux de tous les autres pays du monde réunis et, ce qui es
encore plus grave, le budget alloué à la guerre.
Le président, élu voilà à peine deux ans au nom de
l’un des partis traditionnels, a essuyé la pire défaite dont on se souvienne en
ce dernier quart de siècle. Une défaite qui s’explique par la frustration des
électeurs et par le racisme. William K. Black, économiste et écrivain
étasunien, a signé une phrase mémorable : « La meilleure façon de
voler une banque, c’est d’en être le propriétaire. » Les secteurs les plus
réactionnaires des USA fourbissent leurs armes, adoptant une idée qui est en
quelque sorte l’antithèse de celle des bolcheviques en octobre 1917 :
« Tout le pouvoir à l’extrême droite des États-Unis. »
Il semblerait que l’administration étasunienne,
devant l’échec de ses mesures anticrises traditionnelles, ait recouru à une
autre décision désespérée :
Mercredi 10 novembre, l’une des plus importantes
agences de presse des USA, faisait savoir :
« Le président Barack Obama est arrivé
en Corée du Sud pour participer aux réunions des vingt puissances économiques
du monde les plus importantes. Les tensions en matière de politiques monétaires
et d’intérêts commerciaux sont apparues dès avant le sommet du Groupe des
Vingt. L’ambiance s’est surchauffée quand on a su que les USA allaient injecter
600 milliards de dollars en effectif dans leur faible économie. Cette manœuvre
a rendu furieux des dirigeants dans le reste du monde. Obama a défendu
toutefois la mesure prise par
Cette même agence faisait savoir le 11
novembre :
« Un puissant sentiment de pessimisme a
régné, ce jeudi, à l’ouverture d’un sommet économique des principaux pays
riches et en développement dans la mesure où les dirigeants mondiaux sont
profondément divisés au sujet de leurs politiques monétaires et commerciales.
« Fondé en 1999 et ayant tenu son
premier Sommet voilà deux ans, le Groupe des Vingt (G-20, qui rassemble des
pays développés comme les USA et l’Allemagne et des géants émergents comme
« Un échec du Sommet de Séoul aurait de
graves conséquences. Le risque est que les pays s’efforcent de maintenir leurs
devises artificiellement basses pour procurer à leurs exportations un avantage
compétitif sur les marchés mondiaux, ce qui conduirait à une guerre économique
destructrice.
« Par ailleurs, les pays se verraient
tentés de taxer leurs importations, ce qui serait une répétition des politiques
qui avaient aggravé
« Certains pays, comme les USA, croient
que la priorité maximale est de faire pression sur
« D’autres pays sont furieux devant le
projet de
« Les pays du G-20… ne trouvent guère de
terrain d’entente sur le thème le plus gênant : que peut-on faire dans une
économie mondiale qui dépend des énormes déficits commerciaux des USA envers
« Le président brésilien Luiz Inácio
Lula da Silva, a mis en garde jeudi que le monde courrait à la banqueroute si les pays riches réduisaient leur
consommation et tentaient d’atteindre la prospérité uniquement à partir de
leurs exportations : "Si les pays les plus riches ne consomment pas
et que tous veuillent favoriser leur économie à partir des exportations, le
monde fera faillite parce que plus personne n’achètera. Tout le monde veut
vendre…"
« Le Sommet s’est ouvert sous le signe
du pessimisme pour Obama et le président sud-coréen, Li Myung-bak, car leurs
ministres ne sont pas parvenus à un accord sur un traité de libre-échange
bloqué depuis fort longtemps et dont on espérait qu’il serait réglé cette
semaine.
« Les présidents des pays du G-20 se
sont réunis jeudi soir au Musée national de Corée, à Séoul, pour un dîner qui a
marqué l’ouverture officielle du Sommet.
« Dans les rues avoisinantes, des
milliers de manifestants protestaient contre le G-20 et le gouvernement
sud-coréen. »
Le Sommet s’est clos aujourd’hui, vendredi 12, sur
une déclaration en vingt points et trente-deux paragraphes.
Le monde, on le sait, n’est pas constitué des vingt
pays du G-20 ou de trente-deux pays si l’on ajoute ceux de l’APEC. Quand on
prend la quantité de pays (187) qui ont voté à l’ONU
Ces jours-ci, des agences de presse européennes ont
donné des nouvelles vraiment dramatiques d’Haïti où, en janvier dernier, un
séisme a tué en quelques minutes environ 250 000 personnes :
« Les autorités haïtiennes ont signalé
que l’épidémie de choléra s’étendait avec rapidité dans Gonaïves, au nord de
l’île, dont le maire, Pierreleus Saint-Justin, dit avoir enterré
personnellement trente et une personnes mardi, dans l’attente de donner une
sépulture à quinze autres cadavres : "D’autres pourraient même mourir
en ce moment, tandis que nous parlons", a-t-il déclaré. Depuis le 5
novembre, on a enterré soixante-dix corps rien que dans la ville de Gonaïves,
mais "des gens meurent dans les zones rurales" proches de la ville.
« …La situation "devient
catastrophique" à Gonaïves… Les inondations causées par le cyclone Thomas
peuvent l’empirer.
« Les autorités sanitaires haïtiennes
ont, ce mercredi, élevé à 643 le bilan
de victimes de la maladie dans tout le pays, jusqu’au 8 novembre. On compte
9 971 malades durant cette même période. Les radios informent que les
chiffres qui seront connus vendredi pourraient élever le bilan à plus de 700
victimes.
« …le gouvernement affirme que la
maladie a une grave incidence sur la population de Port-au-Prince et qu’elle
menace la banlieue de la capitale, où plus d’un million de personnes continuent
de vivre sous la tente depuis le séisme du 12 janvier.
Les dépêches d’aujourd’hui parlent de 796 morts et de
12 303 malades.
Plus de trois millions d’habitants sont menacés, dont
beaucoup vivent sous la tente et dans les ruines laissées par le séisme, sans
eau potable.
La principale agence de presse étasunienne informait
hier :
« La première partie du Fonds étasunien
de relèvement d’Haïti est en route, plus de sept mois après la promesse faite
de contribuer à la reconstruction du pays à la suite du séisme dévastateur de
janvier.
« …120 millions de dollars seront
transférés dans les prochains jours, soit le dixième du total promis, au Fonds
de relèvement d’Haïti géré par
« Selon un adjoint de ce même département,
l’argent alloué au Fonds sera assigné à l’enlèvement des décombres, au
logement, à des crédits, à l’appui au plan de réforme éducationnelle de
De l’épidémie de choléra, une maladie qui a déjà
touché durant des années de nombreux pays sud-américains et qui peut se
propager dans les Caraïbes et dans d’autres parties de notre continent, pas un
mot !
Fidel Castro Ruz
le 12 novembre 2010
20 h 49