Réflexions du compañero Fidel
La victoire stratégique
Le livre intitulé La victoire stratégique dans lequel je raconte la bataille qui
empêcha l’extermination de la petite Armée rebelle, sera publié dans
quelques jours.
J’explique dans l’Introduction mes doutes au
sujet du titre : « …je ne savais pas si je devais l’intituler La dernière offensive de Batista ou Comment 300 en vainquirent 10 000 »,
qui collerait mieux à une nouvelle de science-fiction…
Il comprend une petite autobiographie :
« Je ne voulais pas attendre qu’on publie un jour les réponses à
d’innombrables questions qu’on m’a posées sur mon enfance, mon adolescence et
ma jeunesse, ces étapes qui ont fait de moi un révolutionnaire et un combattant
armé. »
Je me suis finalement décidé pour : La victoire stratégique.
Divisé en vingt-cinq chapitres, il contient
de nombreuses photos de la meilleure qualité possible compte tenu de l’époque
et les cartes pertinentes.
Il présente aussi des graphiques sur les
types d’armes utilisées par les deux adversaires.
Aux dernières pages du chapitre 24, je dis
des choses qui se sont avérées prémonitoires.
À la fin de l’allocution que j’écrivis pour
être lue sur Radio-Rebelde le 7 août [1958], au
lendemain de la bataille finale de Las Mercedes, j’affirmai :
« L’offensive a été
liquidée. Le plus impressionnant effort militaire jamais consenti dans notre
histoire républicaine s’est achevé sur le désastre le plus épouvantable, un
désastre que n’auraient jamais pu imaginer l’orgueilleux dictateur et ses
troupes, dont la fuite, au terme de deux mois et demis où elles sont allées de
défaite en défaite, marque les jours finals de son odieux régime. La Sierra Maestra est désormais absolument débarrassée de forces
ennemies. »
J’écris dans La victoire stratégique :
« La déroute de
l’offensive ennemie, au terme de soixante-quatorze jours de combats incessants,
marqua le virage stratégique de la guerre. Dès lors, le sort de la tyrannie fut
définitivement jeté dans la mesure où l’imminence de son effondrement militaire
était évidente.
« Je rédigeai ce même jour
une lettre à l’adresse du major-général Eulogio Cantillo, qui dirigea
toute la campagne ennemie depuis le poste de commandement de la zone
d’opérations, à Bayamo. Je lui confirmai que nous avions fait environ cent
soixante prisonniers, dont beaucoup étaient blessés, et que nous étions prêts à
engager sans retard des négociations pour les lui remettre. Cette seconde
remise de prisonniers se réalisa plusieurs jours après, à Las Mercedes, après
des démarches compliquées.
« Durant ces
soixante-quatorze jours de combats intenses qui permirent de repousser et de
vaincre la grande offensive ennemie, nos troupes eurent trente et un morts. Les
tristes nouvelles n’entamèrent jamais le moral de nos troupes, bien que la
victoire ait souvent eu un goût amer. Pourtant, nous aurions pu perdre bien
plus de combattants compte tenu de l’intensité, de la durée et de la violence
des actions terrestres et des attaques aériennes ; si ce ne fut pas le
cas, c’est parce que nos guérilleros avaient atteint une adresse extraordinaire
dans la nature sauvage de la Sierra Maestra et qu’ils
faisaient preuve entre eux d’une grande solidarité. Des blessés graves réchappèrent
bien souvent parce que leurs compagnons faisaient tout d’abord l’impossible pour
les transporter en plein combat là où les médecins pouvaient les soigner, et ce
malgré le terrain escarpé et le sifflement des balles.
« J’ai mentionné au long
de ces pages les noms des morts, mais je tiens à en dresser de nouveau la liste
complète, parce que ces martyrs méritent que notre peuple les rappelle
éternellement avec respect et admiration :
Comandantes : Andrés Cuevas, Ramón Paz et René Ramos Latour, Daniel.
Capitaines
: Ángel Verdecia et Geonel
Rodríguez.
Lieutenants
: Teodoro Banderas, Fernando Chávez, El
Artista, et Godofredo Verdecia.
Combattants
: Misaíl Machado, Fernando Martínez, Albio Martínez, Wilfredo Lara (Gustavo), Wilfredo González (Pascualito),
Juan de Dios Zamora, Carlos López Mas, Eugenio Cedeño,
Victuro Acosta (El Bayamés), Francisco Luna,
Roberto Corría, Luis Enrique Carracedo, Elinor Teruel, Juan Vázquez (Chan Cuba), Giraldo Aponte (El Marinero), Federico Hadfeg, Felipe Cordumy, Lorenzo Véliz, Gaudencio Santiesteban, Nicolás Ul, Luciano
Tamayo, Ángel Silva Socarrás et José Díaz (El Galleguito).
Paysans collaborateurs : Lucas Castillo et des
membres de sa famille ; Ibrahim Escalona Torres.
« Honneur et gloire
éternels, respect infini et affection pour ceux qui moururent alors.
« L’ennemi souffrit plus
de mille pertes, dont plus de 300 morts et 443 prisonniers ; au moins cinq
de ses grandes unités complètes furent annihilés, capturés ou
désarticulés ; nous nous emparâmes de 507 armes, dont deux chars, dix
mortiers, plusieurs obusiers et douze mitrailleuses calibre 30.
« À quoi il faut ajouter
l’effet moral de ce dénouement et son importance sur le cours de la
guerre : dès lors, l’initiative stratégique passa définitivement aux mains
de l’Armée rebelle, maîtresse absolue, par ailleurs, d’un vaste territoire où
l’ennemi ne tenterait même plus de pénétrer. De fait, la Sierra Maestra était libre à jamais.
« La victoire sur la
grande offensive ennemie de l’été 1958 marqua le tournant irréversible de la
guerre. L’Armée rebelle, triomphante et extraordinairement renforcée par
l’énorme quantité d’armes qu’elle avait récupérée, était en mesure de lancer
son offensive stratégique finale.
« Ces événements ouvrirent
la voie à la nouvelle et ultime étape de notre guerre de libération, qui se
caractérisa par l’invasion du centre du pays, et par l’ouverture du IVe
Front oriental et du Front de Camagüey. La lutte gagna tout le pays. La grande
offensive finale de l’Armée rebelle entraîna, grâce à la campagne fulminante
d’Oriente et de Las Villas, la défaite définitive de l’armée de la tyrannie et,
par voie de conséquence, l’effondrement militaire du régime et la prise du
pouvoir par la Révolution victorieuse.
« Environ trois mille
hommes, équipés des armes enlevées à l’ennemi, décidèrent de la victoire de la
contre-offensive de décembre 1958.
« Les colonnes du Che et
de Camilo, progressant dans les plaines du Cauto et du Camagüey, atteignirent le centre du pays. À
l’école de Minas del Frío,
l’ancienne 1re colonne entraîna de nouveau plus de mille
recrues qui, conduites par des chefs nés de leurs propres rangs, occupèrent les
localités et les villes sur la route nationale entre Bayamo y Palma Soriano. Nous détruisîmes des half-tracks T-37 flambant
neuf, et les chars lourds et l’aviation de combat ne purent empêcher la prise
de villes cent fois plus grandes que le petit hameau de Las Mercedes.
« La 1re
Colonne en pleine avancée fut rejointe par les forces du IIe Front
oriental Frank País, et c’est ainsi que nous
occupâmes la ville de Palma Soriano le
Le 1er janvier 1959
– la date exacte signalée dans la lettre que j’avais adressée à Juan Almeida avant le début de la dernière offensive de la
dictature contre la Sierra Maestra – la grève générale révolutionnaire, décrétée
sur Radio Rebelde depuis Palma Soriano,
paralysa le pays. Le Che et Camilo reçurent l’ordre
d’avancer sur la route nationale vers la capitale, et aucune force ne leur
résista.
Cantillo,
réuni avec moi, Raúl et Almeida,
reconnut que la dictature avait perdu la guerre, mais tenta peu après dans la
capitale de faire des manœuvres putschistes, contre-révolutionnaires et pro-impérialistes, violant les conditions d’un armistice qu’on
lui avait imposées. Il n’empêche que trois jour plus tard, nous étions en
possession des cent mille armes, des bateaux et des avions qui avaient peu
avant permis et appuyé la fuite du dernier bataillon à être entré dans la
Sierra Maestra. »
Une équipe du Bureau des questions
historiques du Conseil d’Etat, des maquettistes du Grupo
Creativo de Casa 4, sous la direction de l’ayudantía ; le
cartographe Otto Hernández, le général de brigade Amels
Escalante, le maquettiste Jorge Oliver, le jeune
dessinateur Geordanis González, sous la direction de Katiuska Blanco, journaliste et écrivaine brillante et
inlassable, sont les principaux acteurs de cette réussite.
Je pensais que le livre mettrait des mois à
sortir. Je sais maintenant qu’il sera publié début août.
Moi, qui ai travaillé des mois sur ce thème
après ma grave maladie, je me sens maintenant encouragé à continuer d’écrire la
deuxième partie de cette histoire dont le titre sera, si l’équipe n’en suggère
pas un autre, La contre-offensive
stratégique finale.
Fidel Castro Ruz
Le