Réflexions du compañero Fidel

 

UNE DÉCLARATION BRILLANTE ET COURAGEUSE

 

Les questions devenues prioritaires auxquelles j’ai dû me consacrer m’ont empêché momentanément de rédiger des Réflexions avec la même fréquence qu’en 2010,  mais la proclamation du leader révolutionnaire Hugo Chávez Frías, jeudi dernier, me contraint à écrire ces lignes.

 

Le président vénézuélien est l’un de ceux qui ont le plus fait pour la santé et l’éducation de son peuple. Comme ce sont là deux domaines où la Révolution cubaine a accumulé le plus d’expérience, c’est avec plaisir que nous collaborons au maximum avec ce pays frère.

 

Non que ce pays ait manqué de médecins, tant s’en faut : il en possédait en abondance, et parmi eux on compte des professionnels de qualité, comme dans d’autres pays d’Amérique latine. Mais il s’agit d’une question sociale. Les meilleurs médecins et les équipements les plus de pointe peuvent être parfaitement, comme dans tous les pays capitalistes, au service de la médecine privée. Parfois, ce n’est même pas ça, parce que dans le capitalisme sous-développé, comme celui qui existait au Venezuela, la classe riche possédait les ressources suffisantes pour se rendre dans les meilleures cliniques des États-Unis ou d’Europe, ce qui, nul ne pourra le nier, était habituel et le reste.

 

Pis encore, les États-Unis et l’Europe s’attachent à séduire les meilleurs spécialistes de n’importe quel pays exploité du Tiers-monde pour qu’ils abandonnent leur patrie et émigrent vers les sociétés de consommation.  La formation de médecins pour ce monde-là dans les pays développés  coûte des sommes fabuleuses que des millions de familles pauvres latino-américaines et caribéennes ne pourraient jamais payer. Ça se passait à Cuba jusqu’à ce que la Révolution ait accepté de relever le défi de former des médecins  capables non seulement de servir leur pays, mais aussi d’autres peuples d’Amérique latine, des Caraïbes et du reste du monde.

 

Nous n’avons jamais arraché des intelligences à d’autres peuples. Au contraire, nous avons formé gratuitement des dizaines de milliers de médecins et d’autres professionnels de haut niveau pour les rendre ensuite à leurs pays.

 

Le Venezuela et Cuba, grâce à leurs profondes révolutions inspirées de Bolivar et de Martí, ont développé extraordinairement la santé et l’éducation. Tous les citoyens y ont le même droit réel de recevoir gratuitement une éducation générale et professionnelle, ce que les États-Unis n’ont pas pu ni ne pourront garantir aux leurs. En fait, le gouvernement de ce pays investit chaque année un billion de dollars dans son appareil militaire et ses équipées guerrières ; ce pays est le plus gros exportateur d’armes et d’instruments de mort et le plus gros marché de drogues au monde, raison pour laquelle des dizaines de milliers de Latino-Américains perdent la vie chaque année.

 

C’est là quelque chose de si réel et de si notoire qu’un président, militaire de métier, s’est plaint amèrement, voilà plus de cinquante ans, du pouvoir décisif que le complexe militaro-industriel avait accumulé dans son pays.

 

Je n’aurais eu aucune raison d’écrire tout ceci, n’était  la campagne odieuse et répugnante déclenchée par les médias de l’oligarchie vénézuélienne au service de l’Empire, qui tirent prétexte des problèmes de santé que connaît le président bolivarien auquel nous unit une amitié étroite et indestructible née dès sa première visite dans notre patrie, le 13 décembre 1994.

 

Certains se sont étonnés que sa visite à Cuba ait coïncidé avec les soins médicaux dont il a eu besoin. Le président vénézuélien est venu dans notre pays dans le cadre d’un déplacement qui l’a conduit d’abord au Brésil et en Équateur : il n’avait pas la moindre intention de se faire soigner ici.

 

Des spécialistes cubains, on le sait, prêtent service depuis des années au président vénézuélien qui, fidèle à ses principes bolivariens, n’a jamais vu en eux des étrangers indésirables, mais des fils de la grande Patrie latino-américaine pour laquelle le Libertador a lutté jusqu’à son dernier souffle.

 

La première équipe de médecins cubains à s’être rendue au Venezuela l’a fait à l’occasion de la tragédie survenue dans l’État de Vargas, qui a coûté des milliers de vie à ce noble peuple. Cette solidarité-là n’était pas une nouveauté, elle constitue une tradition qui remonte aux premières années de la Révolution, depuis que, voilà presque un demi-siècle, des médecins cubains ont été envoyés en Algérie, au lendemain de son indépendance. Cette tradition s’est consolidée à mesure que la Révolution cubaine, au milieu d’un blocus cruel, formait des médecins internationalistes. Des pays comme le Pérou, le Nicaragua sous Somoza et d’autres du continent et du Tiers-monde, victimes de tragédies – séismes ou autres catastrophes – ont bénéficié de la solidarité de Cuba. Notre nation est devenue ainsi celle où le  taux de médecins et de personnels spécialisés en santé, dotés de beaucoup d’expérience pratique et de capacité professionnelle, est le plus élevé au monde.

 

Le président Chávez a traité notre personnel de santé avec beaucoup d’égards. C’est ainsi que des liens de confiance et d’amitié se sont noués et développés entre les médecins cubains, toujours très sensibles au respect du leader vénézuélien, et celui-ci, qui a été capable de créer des milliers de centres de santé et de les doter des équipements nécessaires pour qu’ils puissent prêter des services gratuits à tous les Vénézuéliens. Aucun gouvernement au monde n’a fait autant pour la santé de son peuple en si peu de temps.

 

De nombreux personnels cubains de la santé ont prêté service au Venezuela, dont beaucoup ont aussi fait fonction de professeurs dans différentes matières pour former plus de vingt mille jeunes vénézuéliens en voie de conclure leurs études et dont beaucoup les ont commencées  dans notre pays. Les médecins internationalistes du 51e Bataillon, diplômés de l’École latino-américaine de sciences médicales, se sont gagné un prestige solide dans des missions complexes et difficiles. C’est sur ces bases-là que mes relations avec le président Hugo Chávez se sont développées dans ce domaine.

 

Je tiens à ajouter que le président et leader de la Révolution bolivarienne n’a pas pris un seul jour de repos depuis plus de douze ans, à partir du 2 février 1999, et que sur ce plan il occupe une place unique dans l’histoire de ce continent. Il a consacré toutes ses énergies à la Révolution.

 

On pourrait affirmer qu’à chaque heure supplémentaire que Chávez consacre à son travail, un président étasunien en prend deux de repos.

 

Il était difficile, voire impossible, que sa santé ne s’en ressente pas, ce qui est arrivé ces derniers mois.

 

Habitué aux rigueurs de la vie militaire, il supportait stoïquement les douleurs et les gênes qui survenaient de plus en plus fréquemment. Compte tenu des relations d’amitié nouées entre nous et des échanges constants entre Cuba et le Venezuela,  je n’ai pas eu de mal, si l’on ajoute ma propre expérience personnelle en matière de santé depuis le 30 juillet 2006, à me rendre compte qu’il avait besoin d’un bilan de santé rigoureux.  C’est trop de générosité de sa part que de m’attribuer quelque mérite à cet égard.

 

J’admets bien entendu que la tâche que je me suis imposé n’était pas facile. Je n’avais pas de mal à me rendre compte que sa santé se détériorait. Sept mois s’étaient écoulés depuis sa dernière visite à Cuba. Les médecins qui le soignaient m’avaient prié de faire cette démarche. Le président Chávez était décidé dès le premier moment à informer le peuple de son état de santé avec une clarté absolue.  Aussi, alors qu’il était sur le point de regagner son pays, lui avait-il fait connaître, à travers son ministre des Affaires étrangères, son état de santé à ce moment-là et avait-il promis de le tenir au courant en détail.

 

Compte tenu des circonstances, chaque soin était accompagné d’analyses cellulaires et de laboratoire rigoureuses.

 

L’un de ces examens, plusieurs jours après la première intervention, a donné des résultats qui ont exigé une opération chirurgicale plus radicale et un traitement spécial du patient.

 

Le président, notablement remis, a parlé clairement de son état de santé dans son digne message du 30 juin.

 

J’avoue qu’il ne m’a pas été facile d’informer mon ami de cette nouvelle situation. J’ai pu constater avec quelle dignité il a appris la nouvelle qui, pour quelqu’un qui avait tant d’idées en tête et d’activités en perspective – dont les festivités pour le bicentenaire de l’indépendance du Venezuela  et la concrétisation de l’accord scellant l’unité de l’Amérique latine et des Caraïbes – signifie, bien plus que les souffrances physiques qu’impliquait une chirurgie radicale, une épreuve qui, comme il l’a dit, est seulement comparable aux moments les plus durs qu’il a dû surmonter dans sa vie de combattant que rien n’abat.

 

L’équipe de personnes qui s’occupe de lui et qu’il a qualifiée de sublime a livré la magnifique bataille dont j’ai été témoin.

 

J’affirme sans hésiter que les résultats sont impressionnants et que le patient a livré une bataille décisive qui le conduira – et le Venezuela avec lui – à une grande victoire.

 

Il faut faire en sorte que son message soit communiqué intégralement dans toutes les langues, mais surtout qu’il soit traduit et sous-titré en anglais, une langue que l’on peut comprendre dans cette tour de Babel en quoi l’impérialisme a converti le monde.

 

Les ennemis d’Hugo Chávez – ceux du dedans et ceux du dehors – sont maintenant à la merci de ses paroles et de ses initiatives. Il leur réserve sans aucun doute des surprises. Offrons-lui notre appui et notre confiance les plus résolus. Les mensonges de l’Empire et la trahison des bradeurs de patrie feront fiasco.  Il y a aujourd’hui  des millions de Vénézuéliens combatifs et conscients que l’oligarchie et l’Empire ne pourront plus jamais soumettre.

 

Fidel Castro Ruz
Le 3 juillet 2011
16 h 12